Le vinaigre est une solution aqueuse (mélange d’eau et de composés solubles dans cette dernière) obtenu par la fermentation acétique de boissons ou de dilutions alcooliques. Il est obtenu par un procédé naturel de transformation de l’éthanol (CH3 CH OH) et de l’oxygène (O2) en acide acétique (CH 3 COOH) ce qui donne la réaction chimique suivante :
CH3 CH2 OH + O 2 → CH 3 COOH + H2 O
Le vinaigre ainsi obtenu est liquide, faible en acide acétique, entre 5 à 20 % du volume. Il a de nombreuses applications tant industrielles que médicales ou domestiques. Il est utilisé en parfumerie, en cosmétique ou comme nettoyant ménager ou de décapage (le vinaigre d’alcool déshydraté en cristaux est un nettoyant préservant l’environnement). Mais il est principalement utilisé comme condiment et en tant qu’agent conservateur des fruits et légumes ou comme ingrédient de cuisson.
Condiment
Un condiment est une substance ou une préparation destinée à assaisonner (vinaigre, vinaigrette, moutarde, ketchup, sauce worcestershire, tabasco…), mais pouvant éventuellement être consommée en légume (cornichons), qui relève la saveur des préparations culinaires, notamment des sauces. Le plus souvent d’origine végétale (poivre, piments, persil…), il peut être d’origine animale (bouillon de viande) ou minérale (sel).
Un condiment est servi à part du mets, il se distingue des herbes et des aromates de cuisine intégrés directement dans la préparation, bien que certains aromates soient aussi des condiments.
Étymologie et terminologie
Étymologiquement, le mot « vinaigre » vient du vieux français « vyn egre » issu du latin médiéval « vīnum ācre » signifiant « vin aigre ». Certaines langues européennes ont repris ce mot français de vinaigre comme l’anglais (Vinegar), l’espagnol (Vinagre), le portugais (Vinagre) tandis que d’autre utilise la racine latine du mot « acetum » (être piquant) du verbe acēre ; comme en allemand (Essig), en néerlandais (Azijn), en italien (Aceto).
Par contre, le français à garder le mot « acetum » pour former le terme « acétique », dont l’acide acétique est le principal constituant du vinaigre après l’eau.
Toute fois, « vinaigre » et « vin aigre » sont, à la fois, deux produits différents et deux étapes du même processus de transformation. Le terme « vin aigre » désignant un vin qui a tourné légèrement acide (aigre) ou qui est en passe de le devenir du vinaigre.
Le mot français vinaigre est trompeur, car il renvoie au vin, mais n’en est pas systématiquement constitué, il existe de nombreuses autres formes de vinaigre : de fruits, de lait, de grain… et n’en est pas à l’origine non plus, les Babyloniens il y a 5 000 ans fabriquaient du vinaigre à partir de dattes, de figues et de bière. De même que l’acceptation moderne du mot « vinaigre » renvoie à un condiment ou à produit chimique ménager et non à une boisson.
Donc, de la boisson de l’antiquité (acetum) au condiment d’aujourd’hui (vinum acre), quand nous parlons de « vinaigre » au travers des siècles, nous ne parlons pas du même produit.
Histoire
Le vinaigre est présent dans toutes les civilisations anciennes pratiquant le brassage de la bière ou du vin : Égyptienne, Perse, Romaine, Grecque et Babylonienne ou Chinoise. Elles ont inévitablement découvert le vinaigre, résultat naturel de l’évolution de ces boissons fermentées laissées à l’air libre.
Connu en Mésopotamie vers 3 000 ans av. J.-C. le vinaigre est utilisé comme condiment et pour la conservation, par les babyloniens.
L’utilisation médicale du vinaigre vers 2 000 ans av. J.-C., le vinaigre est attesté pour soigner les blessures. Hippocrate au Ve siècle av. J.-C. le conseil pour les maladies respiratoires et les problèmes digestifs.
En Asie, la dynastie chinoise des Zhou (1046-256 av. J.-C.) a commencé à industrialiser la production de vinaigre. Dans le livre des Zhouli (Livre des rites) compilé et commenté par Confucius ou ses disciples, il est mentionné que de nombreuses familles nobles ou royales avaient un « fabricant de vinaigre » attitré. La majeure partie de la fabrication de vinaigre était alors concentrée autour de la ville de Jinyang aujourd’hui la ville de Taiyuan dans la province du Shanxi et qui reste célèbre pour ses fabrications de fabrication de vinaigre et leurs utilisations à des fins culinaires et médicinales. Elles ont été consignées dans le manuel agricole Qi Min Yao Shu.
Son utilisation dans la société méditerranéenne est également est attesté par l’ancien et le nouveau testament font référence au vinaigre ou au « vin aigre ».
Lucius Iunius Moderatus Columella dit Columelle, agronome romain de la première moitié du Ier siècle, dans son ouvrage « De re rustica » nous a transmis plusieurs recettes de fabrication de vinaigre à base de vin, de figues ou d’orge.
On sait, que les Romains faisaient bouillir le « vin aigre » dans des récipients étamés (avec de l’étain riche en plomb) pour produire un sirop très sucré appelé sapa. Le sapa était riche en acétate de plomb, une substance sucrée appelée sucre de plomb ou sucre de Saturne, et qui provoqua de nombreux empoisonnements au plomb dans l’aristocratie romaine, la maladie correspondant à une intoxication aiguë ou chronique par le plomb est notamment nommée saturnisme.
Sapa
Le sapa (ou saba en italien) est toujours fabriqué de nos jours, il est associé à la cuisine des Abruzzes, connu sous le nom de « mosto cotto », mais il est aussi utilisé dans d’autres régions italiennes (Émilie-Romagne, Marches et Sardaigne). En Sardaigne, le sapa peut-être aussi être obtenu à partir de figue de Barbarie.
Le sapa est également produit en France en Bourgogne où il est connu sous le nom de « raisiné ».
Le sapa est utilisé comme condiment, sirop pour dessert, sauce aigre-douce pour plat ou édulcorant pour gâteau. Dilué dans l’eau, il donne une boisson rafraîchissante. Il sert à la fabrication du vinaigre balsamique par fermentation.
La méthode d’Orléans
La méthode se distingue des techniques industrielles, car elle utilise une fermentation naturelle dite de surface, aucun ajout de bactéries acétiques pour accélérer le processus d’acescence acétique n’est fait, ni aucun brassage.
Autres vinaigres et marinades
Pendant ce temps, en Angleterre, se développe un vinaigre de malt connu sous le nom d’alegar. Qui est devenu un assaisonnement traditionnel pour le « fish and chips ».
En Italie, dans le duché de Modène, commence les premières productions de vinaigre balsamique, qui ne sera guère connu et dont il faudra attendre les guerres napoléoniennes après avoir été vendu à l’étranger par les troupes françaises pour qu’il soit largement diffusé et reconnu.
En Allemagne, il était considéré comme un remède et en particulier le vinaigre aux herbres. Hildegard von Bingen, Nostradamus et Florenz von Venningen rapportent dans leurs écrits sur le mode d’action et l’utilisation des plantes médicinales extraites de l’« acétum sanum ». À cette époque, principalement pour la désinfection, le corps humain était soumis à divers liniments ou onguents à base de vinaigre.
Au XVIe siècle, les marinages (marinade) de légumes et /ou de viande dans du vinaigre ou du « vin aigre » ou encore dans des saumures étaient alors très populaires en France. « Vin aigre » ou « vinaigre » ce sont les effets de l’acide acétique (associé aux arômes) qui sont recherchés, car ils permettent de soutenir ou compléter la saveur de l’ingrédient, de permettre une meilleure conservation et modifier légèrement sa texture. Ces marinades se retrouvent dans bon nombre recettes traditionnelles françaises comme le bœuf bourguignon, le coq au vin ou encore la choucroute…
Le bœuf bourguignon
Plat dominical traditionnel, le bœuf bourguignon est une estouffade de bœuf qui tient son nom des deux produits bourguignons qui le composent : le bœuf et le vin rouge.
La préparation consiste à faire macérer (minimum 24 h) la viande dans le vin puis de les cuire lentement à feu doux.
La Bourgogne étant traditionnellement réputée pour ses élevages bovins, en particulier de la race charolaise, et la réputation des vins, en particulier des vins du vignoble de la côte de Nuits et du vignoble de la côte de Beaune.
Le coq au vin et certaines daubes en sont des variantes.
Le chou à choucroute
L’origine de mode de préparation du chou est incertaine, elle viendrait de Chine, selon la légende, il aurait été inventé au IIIe siècle avant notre ère par les constructeurs de la Grande Muraille pour résister au froid. Selon une hypothèse, les Huns l’auraient apporté avec eux lors de leurs conquêtes vers l’ouest, passant par la Bavière et l’Autriche avant d’atteindre l’Alsace en 451, date à laquelle cette préparation du chou serait apparue dans ces régions. D’autres auteurs évoquent le rôle possible des Tatars ou des Mongols, tout en notant que des auteurs de l’Antiquité gréco-romaine comme Columelle ou Caton l’Ancien connaissaient également déjà des recettes de conservation du chou.
Les feuilles de choux entières ou rappées sont mélangées avec du sel (environ 2,5 % à 3 % du poids des légumes) dans un tonneau fermé rendu hermétique afin de pouvoir fermenter durant six à huit semaines. Dans le but d’accélérer le processus, il est ajouté un vinaigre au vin blanc. En France, les premières références à la cuisson du chou ainsi préparé datent du XVe siècle, des textes du XVIe siècle en attestent la présence à la table des monastères.
En France, ce n’est qu’au XIXe siècle que la choucroute désignera le plat de chou cuit avec son accompagnement.
Propriétés antiseptiques
Globalement, avant les travaux scientifiques du début du XVIIIᵉ siècle, le vinaigre est essentiellement employé pour ses propriétés antiseptiques. À cette époque, on utilisait encore le vinaigre pour purifier l’eau avant de la boire.
Lors de la Grande Peste de 1720, le vinaigre fut utilisé comme désinfectant. Antoine Maille l’aurait enrayé à Marseille avec son vinaigre des quatre voleurs.
Vinaigre des quatre voleurs
Le « vinaigre des quatre voleurs » est une macération dans du vinaigre de plantes aromatiques et médicinales à propriétés antiseptiques qui fit la renommée d’un distillateur-vinaigrier de la région de Marseille, dénommé Antoine Maille. Celui-ci le développa lors de la Grande Peste de 1720.
Selon la légende, cette macération fut inventée par des brigands, détrousseurs de cadavre lors d’épidémies dans le sud de la France. La date (comprise entre le XIVe et le XVIIIe siècle), le lieu et même le nombre de brigands, de même que la composition du remède comporte de nombreuses variations. Sa composition est variable et est généralement constituée de vinaigre (de vin, de cidre ou autre), dans lequel infusent des plantes ou des épices : absinthe, romarin, sauge, menthe, rue des jardins, lavande, acore odorant, cannelle, girofle, muscade, ail, camphre…
Le vinaigre des quatre voleurs fut inscrit au codex en 1748 et vendu en pharmacie comme antiseptique. Selon la légende, Antoine maille préconisait d’avaler à jeun une cuillère à café de ce breuvage diluée dans un verre d’eau et de se frotter les tempes et le creux de la main avec.
Il est encore commercialisé aujourd’hui contre les risques de contagion, soins de la peau, capillaires et des muqueuses, fatigues, maux de tête, encombrement respiratoire, élimination des poux et lentes…
Durant la Renaissance, le « vinaigre » rentre dans la fabrication de l’acide acétique dit « glacial » qui était obtenue en l’additionnant à certains métaux sous forme d’acétate de métal puis la solution étant distillée.
L’acide acétique glacial renferme plus de 99 % d’acide, on le surnomme glacial, car il cristallise en dessous de 16,7 °C, qui est sa température de fusion.
La présence d’eau dans le vinaigre a tant d’influence sur les propriétés de l’acide acétique que pendant des siècles de nombreux chimistes ont cru que l’acide acétique glacial et l’acide présent dans le vinaigre étaient deux substances différentes. Il fallut attendre la fin du XVIIIe siècle et le chimiste Pierre Auguste Adet pour démontrer qu’ils étaient le même composé chimique.
Au début du XVIIIe siècle, Georg Ernst Stahl identifie la fermentation acétique de l’éthanol, puis Herman Boerhaave met en évidence la différence entre cette dernière et la fermentation alcoolique.
En 1822, Christiaan Hendrik Persoon attribue l’acescence acétique (altération du vin) à un biofilm cellulosique qu’il dénomme Mycoderma aceti (littéralement : peau de champignon du vinaigre) : la « mère de vinaigre ».
Dans l’histoire antique, l’usage du vinaigre tel que nous le connaissons aujourd’hui est difficile à suivre, car il est souvent confondu avec le « vin aigre » de raisin ou de palme boisson désaltérante additionnée de substances comme la posca, un vin de piètre qualité coupé d’eau, qui est en fait un genre de piquette.
La piquette
La piquette était à l’origine un vin peu alcoolisé obtenu par une deuxième macération du marc de raisin délayé dans de l’eau avant son pressurage. L’eau issue du repressurage de ce marc de raisin se chargeait avec les restes d’alcool, de coloration et d’arômes, donnant un petit vin léger qui ne se conservait pas longtemps.
Chez les Romains, cette piquette appelée lora ou « boisson des esclaves » (serva potio) était servi parfois chaud. Il était et devait durer jusqu’au solstice d’hiver.
Considéré comme un aliment reconstituant et nourrissant, la piquette entre dans la ration quotidienne du travailleur de force jusqu’au XXe siècle où sa fabrication fut interdite notamment en France en 1945.
Malgré la confusion autour de la terminologie, on peut remonter au IIIe siècle av. J.-C. de son usage en chimie sous forme concentré appelé « vinaigre fort » (acide acétique) où le philosophe grec Théophraste décrit comment le vinaigre agit sur le métal et produit ainsi des pigments utiles pour l’art, incluant le plomb blanc (carbonate de plomb) et vert-de-gris, un mélange vert de sels de cuivre incluant l’acétate de cuivre (tous produits toxiques).
Au Moyen Âge, les polymathes islamiques perses à la fois chimiste et alchimiste, astronome et astrologue, ingénieur, géographe, philosophe, physicien, et pharmacien et médecin ont beaucoup travaillé sur le vinaigre et c’est l’un d’eux Geber abir Ibn Hayyan (Geber) (c. 721 – c. 815) qui concentra par distillation du vinaigre l’acide acétique.
Durant cette période en Europe la fabrication de vinaigre se développe lentement :
En France à Orléans dont la production de vinaigre remonte à une période indéterminée du Moyen Âge devient particulièrement célèbre pour la qualité de ses vinaigres grâce à un processus de fermentation et de vieillissement formalisé qui est devenu la méthode d’Orléans. Il s’agit à l’origine d’une boisson, puis d’un remède et d’un condiment.
Le vinaigre de Reims
Héritière d’une longue tradition vinaigrière, au XVIIIᵉ siècle, les vinaigreries rémoises sont nombreuses et atteignent leur apogée au XIXᵉ siècle avant d’entamer leur déclin et de ne plus être à l’heure représentée que par de rare marque dont : la maison Clovis fondée en 1797 par les familles Charbonneaux et Brabant.
Le vinaigre de Reims est un vinaigre de vin associé depuis plusieurs siècles aux vins de Champagne, il est élaboré à partir des vins issus des cépages Chardonnay, Pinot Noir et Pinot Meunier. Il est vieilli durant 1 an ou 6 ans dans des fûts de chêne. Il a une couleur ambrée, il possède un parfum suave et un goût assez boisé. Il atteint 7° d’acide acétique.
Le vinaigre de Reims, comme d’autres vinaigres haut de gamme, trouve depuis quelques années un renouveau d’intérêt par son utilisation dans la nouvelle cuisine, en y apportant une touche sobre de piquant et d’acidité.
Parmi les versions qui expliquent le surnom de « cornichons » donné aux Rémois, la plus simple et sans doute la plus plausible est que les vignerons champenois écoulaient leurs excédents de vins dans les vinaigreries de Reims qui produisaient aussi de la moutarde et des cornichons en bocaux. Les vignerons des alentours appelaient ainsi les ouvriers vinaigriers les « cornichons » et par extension tous les Rémois.
Études scientifiques et à l’industrialisation.
Louis Pasteur, alors au service des vinaigriers français, met en évidence les processus de fermentation alcoolique et de fermentation acétique. En 1864, il identifie l’une des espèces de bactéries acétiques à l’origine de cette dernière : Acetobacter aceti appelé aussi Gluconobacter ainsi que le rôle de la Drosophila melanogaster, la fameuse « mouche du vinaigre » et à son attirance pour ce breuvage, dans la transmission de la bactérie à l’intérieur des vinaigreries.
Tout cela, bien sûr, en complète contradiction avec l’adage populaire qui veut que : « l’on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ».
Au XIXe siècle, la fabrication du vinaigre subit de nombreux changements liés aux nombreuses études scientifiques et à l’industrialisation.
Le premier procédé industriel à grande échelle pour la production de vinaigre a été inventé par Karl Sebastian Schüzenbach en 1823 et dite « méthode allemande » consiste à faire circuler l’alcool sur des copeaux de hêtre pour réduire les temps de fermentation de plusieurs mois à 1 à 2 semaines.
Le Japon a également commencé à industrialiser la production de vinaigre vers 1804, lorsque Matazaemon Nakano, héritier d’une famille brassicole, producteur de saké découvre que la lie de saké pouvait être utilisée pour faire du vinaigre de riz. Il fonde la société Mizkan dont les fabrications sont réputées pour faire les meilleurs vinaigres pour sushi.
Vinaigres et moutardes Maille
Fondée par Antoine Maille, distillateur-vinaigrier, il aurait grâce à l’invention du « vinaigre des quatre voleurs » et ses propriétés antiseptiques auraient permis d’enrayer l’épidémie à Marseille.
Sa réputation lui permit de se faire connaître des plus grandes cours européennes et de développer son activité. Dix ans plus tard, son fils, Antoine-Claude Maille, crée une cinquantaine de vinaigres de toilette pour les cheveux, les boutons, la voix, les vapeurs, les bains, etc. Leurs noms (vinaigre de vénus, de virginité, macis, à la Dauphine, à la ravigote, etc.) sont dédiés à en faire des produits de beauté pour la noblesse. Il se lance ensuite dans la fabrication d’une vingtaine de moutardes. À la fin de sa carrière, il aura créé plus de 200 vinaigres de toilettes ou aromatisés et autant de moutardes. En 1747, Antoine-Claude Maille ouvre sa première boutique à Paris et fonde les moutardes Maille. La renommée de Maille s’accroît rapidement et en fait le fournisseur des principales têtes couronnées d’Europe, de la cour de France a celle de Russie en passant par la Hongrie.
Au XIXᵉ siècle, la marque continue à se développer, ouvre notamment en 1845 une boutique Maille à Dijon et remporte des médailles aux Expositions universelles de 1867, 1878, 1883, 1885 et 1889. La marque, rachetée en 1930 par Philippe de Rothschild, s’industrialise. Puis est revendue en 1952 à un groupe moutardier dijonnais Grey-Poupon et fait son entrée dans les grandes surfaces.
Au rythme des acquisitions et des restructurations, en 1996, elle fusionne avec un autre marque pour devenir Amora-Maille.
À cette époque, le vinaigre est très utilisé dans les soins de beauté, pour le traitement des maladies cutanées tenaces en raison de ses effets nettoyants et désinfectants dont le « vinaigre de fleur de violette » de l’impératrice Sissi est toujours célèbre aujourd’hui.
Aujourd’hui
Les vinaigres sont obtenus de la double fermentation alcoolique puis acétique issus de la fermentation de jus de fruits (raisin→vin, pomme →cidre, …) de grain (orge→bière, riz→saké, …) ou de mélasse résultant du raffinage du sucre extrait de la betterave sucrière ou de la canne à sucre.
- La Fermentation alcoolique étant obtenue par l’action d’une enzyme sur le glucose (sucre) apporté par les plantes. Le résultat donnant de l’éthanol (alcool.)
- La Fermentation acétique étant due à une bactérie transformant progressivement l’éthanol et en acide acétique.
La production de vinaigre s’établit selon deux méthodes, l’une dite industrielle et l’autre dite artisanale pour des produits plus élaborés. Pour la cuisine, il existe une très grande variété de vinaigre dont à chaque type correspond une association culinaire spécifique.
- vinaigre d’alcool, à base de mélasse ou d’eau-de-vie
- vinaigre de vin et balsamique, à base de raisin
- vinaigre de fruits, à base de pomme (cidre), poire, tomate, ananas, banane…
- vinaigre de céréales, à base de bière, de saké, de sirop d’orge maltée (dit vinaigre de malt, notamment dans la sauce Worcestershire)…
- vinaigres de sève ou de miel, à base d’hydromel, de betterave (melfor), de sirop de batterie, de sirop d’érable…
- vinaigres de tubercules, à base de gingembre, de curcuma…
- vinaigres de gousses, à base de vanille, d’algarrobina…
- vinaigre de lait et de petit lait
Vinaigre de vin
En France, vers le début du XXe siècle, une réglementation se met en place et décrète que l’appellation « vinaigre de vin » ne sera attribuée qu’au vinaigre de vin ayant un taux d’acide acétique supérieur à 6°, les autres vinaigres aigres-doux étant placé sous la dénomination « condiment ».
Le vinaigre de vin est principalement consommé comme condiment, tel quel ou aromatisé, ainsi que dans certaines marinades et sauces. Il peut être utilisé aussi comme agent de conservation alimentaire, même si traditionnellement le vinaigre d’alcool plus neutre lui est préféré.
Quelques vinaigres de vin sont élevés sous-bois (en fut de bois), notamment les vinaigres : d’Orléans, de Reims, de Xérès, de Bordeaux, de Porto, de Beaune, de Banyuls, de « vin cuit » …
Vinaigre balsamique
Le vinaigre balsamique traditionnel est un vinaigre de vincotto concentré : un moût de raisins cuit ayant subi une fermentation alcoolo-acétique et une concentration par élevage en fûts de bois, avec un taux minimal d’acide acétique de seulement 4,5 % (pour celui de Modène). De saveur aigre-douce, il est strictement utilisé comme condiment (notamment avec certains fromages et desserts). Le vinaigre balsamique traditionnel est originaire des provinces italiennes de Modène et de Reggio d’Émilie. Le vinaigre balsamique générique (le plus répandu) est quant à lui issu d’un mélange de vinaigre et de moût de raisin concentré.
Il existe des préparations similaires au balsamique en Espagne (vinaigre d’arrope), en Turquie, (vinaigre de pekmez).
Le cas particulier du Kombucha
Boisson d’Asie centrale originaire de Mongolie, le kombucha est un breuvage alcoolisé issu d’une solution aqueuse de glucides obtenue généralement par la fermentation de thé sucré. Inversement au vinaigre, elle résulte en premier d’une fermentation acétique, puis suivie d’une fermentation alcoolique. Cette fermentation se manifeste en particulier par le développement en surface d’un biofilm symbiotique de levures et de bactéries acétiques appelé la « mère de kombucha » ou le « champignon de thé ». Cette « mère » peut être utilisée pour la fabrication d’autres boissons fermentées comme le Kéfir (lait fermenté), la bière au gingembre ou encore certain vinaigre asiatique.
Le kombucha est traditionnellement préparé en Russie et en Chine avec du thé vert ou thé noir sucré. Réputé bénéfique comme remède pour de nombreuses affections, il est utilisé pour les problèmes de digestion.
Bien que le nom de Kombucha vienne du japonais « kombu » signifiant « thé d’algues », il n’a cependant rien à voir avec le Kombucha qui est une appellation générique occidental lié à une confusion entre les deux boissons. Le kombucha à un nom différent dans chaque pays où il est consommé : en japonais 紅茶キノコ (kōcha-kinoko), en chinois 红茶菌 (hóng chá jūn), en coréen 홍차버섯차 (hongchabeoseotcha), en russe Чайный гриб (chaynyy grib) ; tous ces noms signifient littéralement « champignon de thé » ou « algue de thé ». On utilise aussi l’acronyme anglais SCOBY pour symbiotic colony of bacteria and yeast.
Le vinaigre d’éthanol
Le vinaigre d’éthanol dit « vinaigre d’alcool », « vinaigre blanc » ou encore « cristal », il résulte comme tous les vinaigres de l’acescence acétique d’une solution aqueuse de mélasse ayant subi une fermentation alcoolique, voire d’eau-de-vie. Généralement commercialisé sous forme liquide ou plus rarement déshydraté en cristaux, il est utilisé comme conservateur alimentaire pour les conserves, ou comme produit ménager en tant que détachant, détartrant, désinfectant ou assouplissant respectueux de l’environnement.
Le vinaigre ménager
Le vinaigre ménager est un vinaigre d’éthanol d’une acidité totale maximale de 14 % et peut avoir un pH de 2,15. Contrairement à une idée très répandue, ce vinaigre ne nettoie pas, car il ne contient aucun tensio-actif. En revanche, par son acidité, le vinaigre ménager est un excellent détartrant. À ce titre, il convient également pour nettoyer les traces de calcaire laissées par l’eau de rinçage sur toute surface, nettoyer les vitres et les miroirs, détartrer les cafetières, carafes ou bouilloires et assouplir le linge lavé en machine ou à la main en remplacement de l’adoucissant industriel.
Le vinaigre d’alcool ou vinaigre blanc a une efficacité antimicrobienne limitée et n’a en particulier pas d’effet contre les virus, par contre, il peut être plus efficace que le bicarbonate de soude sur certaines bactéries dites à Gram négatif.