La gymnastique antique
Le terme gymnastique vient de la Grèce antique, qui signifie « nu » en grec ancien (γυμνός prononcé gumnós). Le gymnase (γυμνάσιον gumnásion) était le lieu où l’on s’exerçait nu. Le terme désignait à la fois les jeunes gens s’entraînant à la palestre que les exercices d’assouplissement et d’échauffement préparant à l’athlétisme (athlète provient du grec ἆθλος âthlos, qui signifie « lutte, combat »). Ces épreuves étaient un résumé des exercices militaires. La gymnastique de compétition était disputée lors des Jeux olympiques.
La gymnastique moderne
La gymnastique (abrégée en « gym ») est un terme générique qui regroupe aujourd’hui des formes très diverses de disciplines sportives, pratiquées pour le loisir ou la compétition : gymnastique artistique, gymnastique rythmique, trampoline, gymnastique acrobatique, gymnastique aérobique, tumbling… Le terme est aussi appliqué à des formes d’activités dites gymniques, plus ou moins liées à la santé ou à la condition physique des personnes la pratiquant, telles que l’aquagym ou le fitness.
La gymnastique en France aujourd’hui
La gymnastique en France est essentiellement régie par la Fédération française de gymnastique (FFG), celle-ci étant affiliée aux instances internationales. Il est également possible de pratiquer la gymnastique auprès de fédérations multisports telles que l’Union française des œuvres laïques d’éducation physique (UFOLEP), l’Union nationale du sport scolaire (UNSS) ou la Fédération sportive et culturelle de France (FSCF).
Histoire du développement de la gymnastique en France
Héritière de pratiques issues de la plus haute antiquité, la gymnastique, qui s’est développée en France dans la bourgeoisie urbaine sous la Restauration et le Second Empire et devient un véritable enjeu national aux débuts de la IIIe République.
Le désastre de 1870 achève d’inscrire la gymnastique parmi les priorités nationales, mobilisant au-delà de la seule sphère politique : dès 1872, l’École normale militaire de gymnastique de Joinville (futur bataillon de Joinville) devient École de gymnastique et d’escrime en s’ouvrant à toute la Nation et en particulier aux instituteurs qui doivent y faire un stage de trois mois à l’occasion de leur service militaire.
L’USGF pilier de la République
Eugène Paz, un professeur de l’école normale d’Auteuil, qui participe activement à ce mouvement, fonde l’Union des sociétés de gymnastique de France (USGF) le 28 septembre 1873. Le journal Le moniteur de gymnastique qu’il a créé en 1868 devient alors Le Gymnaste, titre que la revue fédérale de la Fédération française de gymnastique porte encore à ce jour, et la devise « Patrie, courage, moralité » est adoptée par la nouvelle union qui marque par là son engagement dans le relèvement national après la défaite face à la Prusse et le drame de la Commune de Paris. En 1875, l’USGF regroupe déjà 250 associations. En 1878, le nouveau président, Jean-Jacques Ziegler, organise les 16 et 17 mai une grande Fête de la régénération nationale. En 1889, en réunissant devant le président de la République Sadi Carnot plus de 10 000 gymnastes issus de 830 sociétés étrangères et françaises à la XVe fête fédérale de Paris au polygone de Vincennes, celui-ci scelle enfin l’alliance entre les gymnastes de l’USGF et l’État français. À partir de cette date, les présidents successifs de la République honorent souvent la fête fédérale de leur présence effective et les sociétés de gymnastique sont « autorisées à défiler derrière les corps de troupe avec leur musique et drapeau » et est reconnue par le gouvernement comme un organisme patriotique, est financée à ce titre par le ministère de la Guerre.
L’emprise de la gymnastique s’accentue encore à la fin de la décennie avec la création des bataillons scolaires. Lors de son congrès de 1881, la Ligue de l’enseignement de Jean Macé soutient la démarche et Paul Bert, ministre de l’Instruction publique, instaure l’obligation de la gymnastique et des exercices militaires à l’école primaire par la loi du 28 mars 1882. Enfin, le 18 mai, la cause de la gymnastique reçoit le soutien de la Ligue des patriotes dès sa fondation. L’initiative est officialisée en 1883 par la nomination d’un inspecteur général attitré. L’USGF a déjà acquis alors une dimension européenne et, avec les fédérations belge et néerlandaise, elle participe le 23 juillet 1881 à la fondation du Bureau des fédérations européennes de gymnastique qui devient en 1922 la Fédération internationale de gymnastique (FIG). À partir de 1891, lors de la disparition des bataillons scolaires, beaucoup se muent alors en associations qui renforcent les effectifs de l’USGF.
Jusqu’à l’aube du XXe siècle, l’USGF est surtout un organisme de réflexion dont le comité directeur s’enorgueillit de compter en son sein des sommités scientifiques, politiques, littéraires et médiatiques du moment. Elle s’investit essentiellement à l’organisation de sa grande fête fédérale destinée à mobiliser les énergies au service de la nation. Par contre, elle reste pour le moins réservée à l’égard de la compétition sportive, comme d’ailleurs le bureau européen. Cette position est confirmée par la participation d’un seul Français aux Jeux olympiques d’Athènes en 1896, année où Charles Cazalet accède à la présidence de l’USGF.
Lors des suivants, en 1900 à Paris, la gymnastique est, avec le cyclisme, le sport le plus populaire en France et au centre de l’éducation sportive de la Troisième République. Il revient donc à l’USGF d’inaugurer le tout nouveau vélodrome de Vincennes les 3 et 4 juin par sa fête fédérale avec 8 050 gymnastes venus de toute la France, puis dans la foulée, au concours international organisé les 29 et 30 juillet dans le cadre de l’exposition universelle, où les gymnastes français connaissent un fort succès collectif.
Charles Cazalet entend bien pérenniser l’avantage acquis. Il invite dès l’année suivante le peintre Octave Denis Victor Guillonnet à la fête fédérale de Nice les 7 et 8 avril 1901. Celui-ci voit 3 000 gymnastes défiler devant le tombeau de Gambetta pour lui rendre un hommage solennel que Guillonnet immortalise sur une toile. Cazalet obtient que l’œuvre soit gravée à l’eau-forte et reproduite pour une large diffusion. L’objectif est clairement affiché dans son courrier du 2 octobre 1909 au sous-secrétaire d’État au ministère des Beaux-Arts : « des gravures de propagande qui serviraient, je le crois, admirablement la cause patriotique à laquelle nous sommes attachés ; le souvenir de cette grande manifestation, les idées qu’elle évoque, la mémoire de Gambetta et la défense nationale sont autant de forces de rayonnement pour accroître encore les sentiments patriotiques et républicains de toute notre jeunesse ». Ce succès fait évoluer les mentalités, mais il faut encore attendre 1903 avant que ne soit organisé le premier tournoi international sous l’égide du bureau européen à Anvers. La même année, l’USGF est reconnue d’utilité publique le 12 avril. Fort de ces succès, Charles Cazalet, prend en charge le tournoi suivant à Bordeaux en 1905, l’USGF entre dans l’ère sportive.
L’USGF investit également l’Empire colonial où elle organise sa fête fédérale à Alger dès 1896 puis à Tunis en 1912. Les sociétés de gymnastique d’Afrique du Nord comptent parmi les grandes associations de l’Union et lui fournissent alors ses plus grands champions.
Une organisation sportive prémilitaire 1900 – 1914
L’USGF porte une grande attention à la formation de ses cadres, souvent issus de l’École de Joinville. Afin de leur assurer une formation de niveau supérieur, elle finance en 1903 le Cours supérieur d’éducation physique créé à la Sorbonne. Ce cours préfigure l’intégration universitaire de la formation des enseignants. Cependant, l’objectif majeur reste bien patriotique et l’USGF, qui regroupe 1 100 associations à la veille de la Grande Guerre, contribue largement à fournir à la nation les soldats qu’elle espère pour assurer la revanche. Elle est alors exclusivement masculine et l’Union française des sociétés de gymnastique féminine n’apparaît qu’en 1912. Celle-ci devient en 1921 Fédération des sociétés féminines françaises de gymnastique et des sports (FSFFGS) et se transforme le 12 octobre de la même année en Fédération féminine française de gymnastique et d’éducation physique (FFFGEP). Depuis 1906, les gymnastes bénéficient de nombreux avantages lors de leur service militaire lorsqu’ils sont titulaires du Brevet d’aptitude militaire. Aussi, et à cette fin, le programme de ses compétitions reste surtout collectif et très éclectique. Les titres de champions se décident autant au saut à la perche ou au lever de gueuses qu’à la barre fixe ; même aux championnats du monde, cela persistera jusqu’en 1954. Seuls les tournois des Jeux olympiques se limitent aux seules pratiques gymniques aux agrès. Grâce à cette excellence physique pluridisciplinaire, la gymnastique fournit à l’Armée beaucoup de ses cadres et une grande partie de ses troupes d’élite pendant la guerre 1914-1918 dont elle sort renforcée alors que la fédération omnisports de l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA) se dissout à travers les nouvelles fédérations unisports.
L’après-guerre 1919 – 1942
L’Union perd 100 000 de ses membres et de ses cadres pendant le conflit. Mais elle organise néanmoins un grand rassemblement national en juin 1919 à Nancy afin de célébrer le retour de la Lorraine et de l’Alsace à la France. La tradition humaniste et sociale perdure et Georges Hébert reconnaît cette même année que les cadres des sociétés de gymnastique ont « un passé, des traditions et la conscience d’être utiles au bien public ».
Les résultats internationaux baissent un peu, mais remonte progressivement, Jusqu’en 1930. Les tournois internationaux laissent place à partir de l’année suivante aux championnats du monde dont le premier est organisé à Paris en 1931. À partir de cette date, la France rétrograde régulièrement au classement général.
Pendant cette période l’USGF reste un bastion de l’idéal républicain et la façon dont elle organise sa Fête fédérale est une manière de se mettre au service du régime chaque fois que nécessaire : en 1929 à Orléans pour le 500e anniversaire de la délivrance d’Orléans, fête en l’honneur de Jeanne d’Arc pour soutenir la volonté de l’État laïc à revendiquer le personnage de l’héroïne nationale, en 1930 à Alger pour célébrer le 100e anniversaire de la conquête de l’Algérie et du débarquement de Sidi-Ferruch, l’année suivante à Paris pour l’Exposition coloniale internationale de Paris ou encore les commémorations en hommage à Léon Gambetta.
Cependant, en 1923, le conflit qui oppose depuis 20 ans l’USGF à Philippe Tissié et ses collègues médecins qui lui contestent le monopole de la formation supérieure des enseignants d’éducation physique, tourne à son désavantage et le cours supérieur lui échappe. Elle se recentre alors sur celle des cadres gymniques de ses associations.
Le 2 avril 1942, une fusion est imposée par le régime de Vichy entre l’USGF et son équivalent féminin, la Fédération féminine française de gymnastique et d’éducation physique (FFFGEP). La nouvelle entité créée par cette fusion prend le nom de Fédération française de gymnastique (FFG) et est l’instance nationale qui gère la gymnastique en France depuis cette date.