Avant la création de l’Oktoberfest, les fêtes de la bière étaient déjà courantes en Bavière et dans le reste du monde germanique. En effet, elles permettaient de déstocker la bière brassée en mars (dite Märzen), avant le commencement de la nouvelle saison de brassage.
Contexte historique difficile
En 1810, la Bavière est l’alliée de Napoléon Ier, grâce à ce dernier, le duché est devenu royaume et s’est étendu sur la majorité de la Franconie et de la Souabe. Maximilien Ier, nouveau roi de Bavière, doit réussir à intégrer durablement ces nouveaux territoires dans le royaume.
Première Oktoberfest
La première fête de la bière eut lieu le 17 octobre 1810, suite au mariage du prince héritier, futur roi Louis Ier de Bavière et la princesse Thérèse de Saxe-Hildburghausen qui eut lieu le 12 octobre et pour que le public honorât leur mariage, ils firent organiser une grande course hippique, la « Theresienwiese », du prénom de la princesse, cinq jours après leur union, dans une prairie sous les murs de Munich. La fête ne changea jamais d’emplacement depuis.
Le roi Maximilien Ier en fit une véritable fête nationale et un moyen de renforcer le sentiment d’unité de la Bavière. Alors que la population munichoise était de 40 000 habitant, l’événement réunit 50 000 spectateurs : la course fut un grand succès et la fête fut reconduite.
La dénomination
Les Bavarois nomment généralement l’Oktoberfest par le terme die Wiesn : « la prairie ». La fête s’est initialement appelée Theresens-Wiese. C’est notamment ce terme qui apparaît dans un écrit du prince-héritier Louis en date du 19 novembre 1810. Aux environs de l’année 1815, le nom de Theresienwiese commence à s’imposer. Ce terme désigne par extension la fête qui se déroule sur la prairie, c’est-à-dire, l’Oktoberfest. L’usage tronque ce mot et le terme Wiesen est introduit à l’écrit durant les années 1890. La prononciation bavaroise fait à son tour évoluer l’usage en Wies’n. En 1985, l’office du tourisme de Munich emploie pour la première fois à l’écrit le terme Wiesn sans apostrophe.
L’évolution du nom de la fête contraste avec celui qui désigne le lieu où elle se déroule. Dès 1810, l’usage consacre les termes d’Oktober-Festen. Malgré la perte du pluriel au cours des années, l’appellation a peu évolué pour devenir Oktoberfest.
En français, le terme se traduit littéralement par « fête d’octobre », mais l’expression habituelle est « fête de la bière de Munich ».
La fête agricole
Parallèlement à l’Oktoberfest, fut également fondée la même année l’« association agricole bavaroise » (Landwirtschaftliche Verein in Baiern) qui organisa le 14 octobre 1811la première « foire agricole centrale » sur la Theresienwiese sous le nom de Zentral-Landswirtschaftsfest (ZLF). Elle avait pour objectif d’améliorer les pratiques et techniques agricoles dans le royaume et permettait par ailleurs de rapprocher le souverain de ses paysans autrefois méprisés, et de mettre en œuvre sa politique du souverain éclairé.
En 1836, le gouvernement de Haute-Bavière reconnut que la fête agricole et l’Oktoberfest, bien qu’ayant lieu simultanément, étaient des manifestations distinctes. Durant la seconde moitié du XIXe siècle, la foire agricole perdit de son importance et une partie des exposants quittèrent la Theresienwiese. En 1909, la ZLF eut lieu pour la première fois sur le Theresienhöhe, terrain adjacent à la Wiesn.
La disparition de l’association organisatrice durant la période nazie mit un terme temporaire à cette manifestation. Celle-ci renaquit en 1949 et fut alors organisée tous les deux ans jusqu’en 1974, tous les trois ans de 1975 à 1995. Depuis 1996, elle est programmée tous les quatre ans.
Le développement de l’Oktoberfest
Au cours du XIXᵉ siècle, la fête se développa progressivement
- En 1815, des épreuves sportives se déroulèrent pendant la fête. Des arbres d’escalade vinrent s’ajouter à la piste équestre, bientôt suivis de jeux de quilles et de balançoires.
- En 1818, le premier carrousel apparut
- l’année suivante, la ville de Munich devint l’organisatrice de la fête ; statut qu’elle a conservé jusqu’à aujourd’hui.
- En 1835 eut lieu le premier jubilé de l’Oktoberfest pour ses 25 ans. Pour cette occasion, les habitants de Haute-Bavière furent invités à parader avec leurs habits journaliers, devenue traditionnels. Des courses de chars antiques, ainsi qu’un tournoi athlétique préfigurant les Jeux olympiques modernes furent également organisés.
- En 1850, la statue Bavaria de Ludwig Schwanthaler et Leo von Klenze, fut inaugurée.
- En 1853, le « temple de la gloire » Ruhmeshalle fut installé à ses pieds.
Malgré cela, elle connut de nombreux aléas tant du fait du contexte tant politique que climatique et sanitaire qui firent que quelques éditions de la fête furent annulées :
- En 1813, la Bavière à cause de la guerre contre Napoléon.
- En 1854, à cause une épidémie de choléra qui se déroula en 1853.
- En 1866, à cause de la guerre austro-prussienne.
- En 1870, à cause de la guerre franco-prussienne.
En 1860, Maximilien II interdit l’organisation d’un jubilé pour les 50 ans de la fête, qui, rappelons-le, célébrait le mariage de ses parents, sous prétexte que son père a abdiqué et que sa mère est morte. Après l’unification allemande, le caractère profondément bavarois de l’Oktoberfest est un signe de la différenciation de la Bavière par rapport au reste de l’Allemagne.
Le roi Louis II se démarque de ses prédécesseurs par sa fréquente absence de l’Oktoberfest, son successeur Léopold de Bavière, à l’inverse, essaie de venir systématiquement afin de rapprocher le peuple de la monarchie.
À la fin du XIXᵉ siècle, la fête d’octobre se transforma peu à peu en fête foraine, pour prendre l’aspect sous lequel elle est connue aujourd’hui. Pour profiter des conditions climatiques plus clémentes de fin septembre, la fête fut avancée en 1872 pour que seul le dernier dimanche de fête fût en octobre. En 1881 s’ouvrirent les premières rôtisseries de poulets. En 1886, apparurent les premières ampoules électriques de l’Oktoberfest. L’eau et le gaz furent installés l’année suivante.
La première grande tente est construite en 1895, c’est la Zum Winzerer Fähndl, toutefois en dehors de la Theresienwiese à proprement parler. Elle est dirigée par l’Armbrustschützengilde (la guilde des arbalétriers), qui est une association dont les membres sont costumés en habits moyenâgeux. 1898 voit l’arrivée d’un tavernier remarquable en la personne de Georg lang, dit « Krokodilwirt » (le tavernier crocodile) et originaire de Nuremberg, qui comprend que l’ambiance est primordiale. Il construit pour la première fois une tente de grande taille sur la Theresienwiese. Sous sa tente est chantée pour la première fois la célèbre chanson :« Ein Prosit der Gemütlichkeit. 1-2-3-gsuffa », qu’on pourrait traduire par « Santé !, convivialité, 1-2-3-c’est bu ! », écrite par Bernhard Dietrich. En 1907, six grandes tentes furent installées par les brasseries munichoises, dont la Bürgerbräuhalle, la Spatenbräuhalle, la Hackerbräuhalle et la Löwenbräuhalle.
La fête n’eut pas lieu de 1914 à 1918 à cause de la Première Guerre mondiale. En 1919 et en 1920, seule une petite « fête d’automne » eut lieu. La vente de la bière de l’Oktoberfest, titrant environ 2 degrés d’alcool de plus que la bière normale, n’est alors pas autorisée. Enfin, en 1923 et 1924, l’inflation obligea à de nouvelles annulations.
La fête fut récupérée par les nazis en 1935 pour le 125e anniversaire de la fête ; le mot d’ordre est « Stolze Stadt – Fröhlich Land », soit « ville fière, campagne joyeuse ». Durant la Seconde Guerre mondiale, soit de 1939 à 1945, la fête fut annulée. Enfin, durant l’après-guerre, de 1946 à 1948, seule une « fête d’automne » fut mise en place. Depuis sa création, la fête a ainsi été annulée au total vingt-quatre fois.
En 1950 naquit la tradition des douze coups de canon qui marquent l’ouverture de la fête, ainsi, que celle qui veut que le maire de Munich (l’Oberbürgermeister), à l’époque Thomas Wimmer, doive tirer du premier tonneau, la première bière de la fête en déclarant « O’ zapft is ! » (« la bière est tirée »), à midi précis et marquant le début de la vente de boissons alcoolisées sur le champ. Au cours des décennies suivantes, la fête de la bière se développa pour devenir la plus grande fête foraine au monde.
De nos jours, l’Oktoberfest attire chaque année près de 7 millions de visiteurs, parmi lesquels de nombreux étrangers. Ils représentent environ 19 % des personnes présentes sur la Wiesn ; parmi eux, 17 % sont des Italiens, suivis par les Américains et les Britanniques. De manière plus étonnante, plus de 70 % des personnes sur l’Oktoberfest viennent de Bavière, seuls 9 % viennent du reste de l’Allemagne. Depuis les années 2000 environ, les touristes viennent de plus en plus à la Wiesn en habits traditionnels bavarois, à savoir le Lederhose pour les hommes et le Dirndl pour les femmes.
La fête ne sert que la bière typique de Munich dont il n’y a que des doses d’un litre.
L’Oktoberfest à travers le monde
Depuis la seconde moitié du XXᵉ siècle, le succès des célébrations de l’Oktoberfest a dépassé les frontières de l’Allemagne et l’Oktoberfest de Munich est devenue une attraction touristique qui attire chaque année des milliers de visiteurs étrangers. Tout comme la Saint-Patrick ou le Nouvel An chinois, cette fête est aujourd’hui célébrée à travers le monde. La marque Paulaner (la bière la plus bue lors de l’Oktoberfest à Munich) organise dorénavant des célébrations à travers l’Europe.