Le couscous est d’une part une semoule de blé dur préparée à l’huile d’olive (un des aliments de base traditionnel de la cuisine des pays du Maghreb) et d’autre part, une spécialité culinaire issue de la cuisine berbère, à base de couscous, de légumes, d’épices, d’huile d’olive et de viande (rouge ou de volaille) ou de poisson.
Il est, avec le tajine, l’un des plats emblématiques de la cuisine traditionnelle du Maghreb et plus largement, des cuisines juives d’Afrique du Nord, de la cuisine africaine et du régime méditerranéen, cuisiné selon de multiples déclinaisons régionales et culturelles locales. Les plus anciennes traces connues de couscoussiers sont retrouvées dans des sépultures du IIIᵉ siècle av. J.-C., de l’époque du roi berbère Massinissa de Numidie (dans l’actuel nord de l’Algérie), un des berceaux de la culture du blé. Connu en France depuis le XVIᵉ siècle, il est intégré dans la cuisine française au début du XXᵉ siècle, via l’Empire colonial français et les pieds-noirs d’Algérie.
Les savoirs, savoir-faire et pratiques liés à la production et à la consommation du couscous sont inscrits sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Description
Le couscous est servi le plus souvent avec un ragoût de légumes accompagné de viande, présenté parfois dans un plat en terre cuite traditionnel à tajine. Le plat de base consiste en l’association du couscous (céréale) et d’un apport protéinique, viande, poisson ou pois chiches (légumineuse jouant le rôle de l’apport protéinique). Il peut aussi être consommé seul, aromatisé ou nature, chaud ou froid, comme dessert avec du sucre ou plat d’accompagnement.
Préparation
La préparation du couscous se fait en plusieurs étapes. Dans la première étape, appelée tberkiche ou ftile, on mélange et on tamise de la semoule, de la farine et de l’eau pour former les grains de couscous. Dans la deuxième étape, ce couscous est cuit à la vapeur trois fois. Dans la dernière étape, ce couscous est étalé pour sécher à l’air libre.
Le couscous est l’association de deux plats :
- un plat de semoule de blé cuite à la vapeur dans un couscoussier, agrémentée ensuite d’un corps gras (généralement de l’huile d’olive, parfois du beurre), et simplement salée. Suivant les recettes, on y adjoint : pois chiches, petits pois, raisins secs ;
- un bouillon de légumes tels que courgettes, oignons, carottes, courge rouge, navets, cardes et de viandes (mouton ou poulet) cuits ensemble, rissolés avant de mijoter dans un bouillon.
Traditionnellement, le couscous se prépare avec un seul type de viande, car le bouillon et la semoule qui cuit à sa vapeur s’imprègnent de son arôme. On peut ainsi déguster des couscous à l’agneau, au poisson, au poulet, au chameau… Le couscous peut aussi être végétarien. Il est occasionnellement assaisonné à la harissa.
Étymologie
Le mot seksu (couscous) est un terme d’origine berbère. Il existe dans tous les parlers berbères de l’Afrique du Nord et désigne le blé bien modelé et bien roulé. Suivant les régions amazighophones (de langue berbère), on retrouve les mots berbères keskesu et seksu. Le mot berbère a donné kuskus, kuskusūn en arabe, puis « couscous » en français.
Un autre terme qui dérive de la même racine berbère que seksu est le verbe berkukes, de kukes, « rouler la semoule », et de ber qui signifie « redoubler le travail dans le but d’agrandir les grains ». Le mot taseksut (prononcé en français taseksut) est la passoire dans laquelle on fait cuire le couscous.
Le verbe seksek est utilisé par les Touaregs dans le sens de « passer au crible », rappelant l’usage du tamis dans la préparation.
François Rabelais (1483-1553) a mentionné dans ses œuvres cinq fois le couscous sous le nom coscosson ou coscoton.
Histoire
Durant l’Antiquité
L’historienne culinaire Lucie Bolens décrit des pots primitifs de couscous trouvés dans des tombes qui remontent au règne du roi berbère Massinissa, c’est-à-dire entre 238 et 149 avant Jésus-Christ. Cette région d’Afrique du Nord était particulièrement prospère et était considérée comme le « grenier de Rome ».
Au Moyen Âge
Des origines subsahariennes ?
Mais il y a de nombreuses indications montrant que le processus typique de la cuisson du couscous, en particulier la cuisson à la vapeur des grains sur un bouillon dans un pot en argile, pourrait avoir son origine bien avant le Xᵉ siècle, dans une région de l’Afrique de l’Ouest qui englobe l’actuel Niger, Mali, Mauritanie, Ghana et Burkina Faso. Il faut aussi rappeler que pendant des siècles, les Berbères, les nomades utilisaient des femmes noires pour cuisiner le couscous, ce qui pourrait être une indication supplémentaire de l’origine subsaharienne de la nourriture. L’explorateur et voyageur d’origine berbère, Ibn Battuta quand il s’est rendu en 1352 dans l’actuelle Mauritanie, qu’il avait du couscous de mil. Il a également observé un couscous de riz dans cette même région en 1350.
Des origines berbères
Selon la légende, le couscous était un cadeau céleste pour les Berbères affamés. Lorsque les anges virent que les gens mouraient de faim, ils se mirent à pleurer et leurs larmes se seraient transformées en grains de céréales comestibles.
On a retrouvé les vestiges des premiers ustensiles (connus) dans la région de Tiaret (actuelle Algérie), où les outils de cuisine datant du IXᵉ siècle qui ont été découverts ressemblent très fortement à l’outil principal de cuisson du couscous : le couscoussier.
Ainsi, la semoule, bien connue dans les pays du Maghreb avant la conquête arabe, ne l’est pas par les conquérants du Moyen-Orient. Lors de l’islamisation de l’Afrique du Nord, ils découvrent et adoptent la semoule (semid en arabe) qui devient la base d’un plat des plus importants dans leurs habitudes alimentaires. Ils intègrent ce plat d’origine communément attestée berbère, tant et si bien qu’une histoire connue en Algérie et en Tunisie raconte qu’un « chef de tribu menaça sa femme, fraîchement convertie à l’islam, de la tuer dans le cas où elle serait incapable de préparer ce plat, pour elle encore inconnu ».
Selon Charles Perry, le couscous trouve son origine chez les Berbères, dans le Maroc moderne et le nord de l’Algérie, entre les XIᵉ et XIIIᵉ siècles, entre la fin de la période de la dynastie des Zirides et la naissance du califat almohade. L’historien Hady Roger Idris a déclaré que le couscous n’est attesté qu’à partir de la période hafside au XIIIᵉ siècle, cependant, selon l’historienne Lucie Bolens, le couscous s’est développé dans l’ancienne Numidie, à l’époque du roi numide berbère Massinissa (238 av. J.-C. – janvier 148 av. J.-C.).
Le couscous était également connu dans le sultanat nasride de Grenade. Toujours au XIIIᵉ siècle, un historien syrien d’Alep mentionne le couscous à quatre reprises. Ces citations très anciennes montrent que le couscous s’est propagé rapidement, mais qu’en général, il était courant surtout dans l’ouest islamique (Maghreb) jusqu’en Tripolitaine, tandis que plus à l’est, à partir de la Cyrénaïque, la cuisine était principalement de type égyptien, dans laquelle le couscous n’était qu’un plat occasionnel.
En Europe
En Espagne, le couscous est mentionné en 1464 par l’illustre écrivain Joanot Martorell, figure du Siècle d’or valencien, dans « Tirant lo Blanch ».
On le retrouve aussi avec le nom « alcuzcuzú » dans le portrait de Francisco Delicado de la lozana andaluza, un roman publié à Venise en 1528. Il est mentionné indirectement dans le roman de Miguel de Cervantes « Don Quichotte » publié en 1605. L’écrivain, philologue et spécialiste de la langue espagnole Francisco Rico Manrique, dans son édition du roman, commente ce passage : « Le couscous était préparé avec des raisins secs et de la semoule de blé, un plat très apprécié des Maures ».
En 1630 à Toulon, dans un texte provençal dans lequel un voyageur dénommé Jean-Jacques Bouchard décrit comment se mange un plat semblable au couscous.
L’une des premières références au couscous en Europe du Nord se situe en Bretagne dans une lettre datée du 12 janvier 1699.
Aujourd’hui
Le couscous est devenu très populaire dans les pays d’Europe méditerranéenne comme la France, l’Espagne, le Portugal, l’Italie et la Grèce. En France, en Espagne, en Italie et au Portugal, le mot « couscous » désigne généralement le plat complet (la semoule et le ragoût).
En Europe, le couscous est servi dans de nombreux restaurants maghrébins, il est vendu sous forme préparation rapide contenant une boîte de couscous rapide et une boîte de légumes et de viande.
En France, il est habituellement servi avec de la harissa, une habitude héritée de la cuisine tunisienne.
Dans la péninsule Ibérique
L’une des premières références écrites au couscous vient d’un auteur inconnu de l’Espagne musulmane du XIIIᵉ siècle dans un livre de cuisine intitulé « Kitāb al-Ṭabikh fī al-Maghrib wa al-Andalus fī ʽAṣr al-Muwaḥḥidīn » (Le livre de la cuisine au Maghreb et en Andalousie à l’époque des Almohades), qui donne une recette de couscous. Selon l’historienne Lucie Bolens, de l’Université de Genève, l’introduction du couscous dans la péninsule Ibérique daterait de la période de la dynastie berbère des Almohades, au XIIIᵉ siècle. La popularité du couscous se propage alors rapidement en Espagne et au Portugal.
Au Portugal, il est introduit selon certaines sources durant le règne du roi Manuel Iᵉʳ, entre 1495 et 1521. Outre plusieurs écrits de l’époque, le couscous est évoqué dans une pièce du père du théâtre portugais moderne Gil Vicente (vers 1465 -1537). Il est consommé par la petite et haute noblesse pendant les XVIᵉ et XVIIᵉ siècles où il faisait partie du menu quotidien, partageant la table avec le riz et autres céréales.
C’est à partir de cette époque que les Portugais commencèrent à coloniser le Brésil et y introduire le couscous. Selon l’anthropologue brésilien Luis da Cámara Cascudo (1898- 1986) le couscous brésilien utilisant des farines issues du manioc, du maïs, de la noix de coco… serait le résultat des influences gastronomiques tant du Portugal que des cultures d’esclaves africaines. Outre le Brésil, le couscous est également consommé dans d’autres pays d’Amérique latine.
En France
Connu en France depuis le XVIᵉ siècle, Rabelais est le plus ancien écrivain à parler du couscous (surnommé « couscoussou ») dans son roman Pantagruel de 1532. Quant à Alexandre Dumas, il l’appelle « coussou coussou » dans son Grand Dictionnaire de cuisine, de mélange de recettes et de récits historiques.
Sa consommation ne se répand sur la rive nord du bassin méditerranéen qu’au XXᵉ siècle :
- d’abord dans les familles de militaires et d’administrateurs stationnées en Afrique du Nord entre 1830 et 1962,
- dans les familles algériennes envoyées en métropole pour remplacer dans les usines les hommes partis au front militaire, pendant la Première Guerre mondiale (1914-1918),
- chez les 1 343 000 appelés ou rappelés du contingent, ainsi que les 407 000 militaires d’active (soit 1 750 000 militaires), qui participeront entre 1952 et 1962 au maintien de l’ordre en AFN qui ramèneront dans leurs familles en métropole ce plat traditionnel du Maghreb ainsi que l’art du méchoui, qui consista à cuire mouton entier à la broche, sur les braises d’un feu de bois et accompagnée de haricots blancs ou de flageolets,
- puis par le million Pieds-noirs, rapatriés d’Algérie entre 1962 et 1965, au moment de l’indépendance, contribueront à l’intégrer à la cuisine française,
- ainsi que par les 100 000 harkis également rapatriés d’Algérie entre 1962 et 1968,
- et pour finir les différentes d’immigration venue du Maghreb depuis les années 50.
Tout cet ensemble contribuera en faire du couscous, à ce jour, le troisième plat préféré des Français.
La reconnaissance
En janvier 2019, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie émettent un « projet commun » pour inscrire le couscous au patrimoine mondial de l’Unesco. La candidature conjointe de quatre pays d’Afrique du Nord : l’Algérie, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie, a été saluée comme un exemple de coopération internationale.
En décembre 2020, « les savoirs, savoir-faire et pratiques liés à la production et à la consommation du couscous » sont inscrits par l’UNESCO sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.