Mezcal et Tequila

Les Méso-américains ne connaissant pas le procédé de la distillation, la seule boisson alcoolisée qu’ils tiraient de l’agave était le pulque, boisson alcoolisée traditionnelle issue de la fermentation partielle de la sève de divers agaves (dont Agave americana, A. atrovirens, A. salmiana, A. mapisaga et A. marmorata), dont le degré d’alcool était faible, entre 6 et 8° GL Gay-Lussac environ. Les analyses menées par l’université nationale autonome de Mexico sur d’anciens fours découverts à Xochitécatl-Cacaxtla suggèrent qu’un processus de chauffage-fermentation-distillation a pu être mis en œuvre pour obtenir une liqueur rituelle de plus fort degré alcoolique.

Les Espagnols, à la recherche d’une eau-de-vie plus forte, introduisirent en Nouvelle-Espagne, au XVIIᵉ siècle, le processus de la distillation que les Arabes avaient eux-mêmes introduit en Espagne au VIIIᵉ siècle. C’est là l’origine de la création du Mezcal et de la Tequila.

La tequila est une eau-de-vie qui doit obligatoirement être élaborée à partir de l’Agave tequilana, variété bleue. Pour le mezcal, toutes les variétés d’agave sont autorisées. Contrairement aux apparences, les Agaves ne font pas partie de la famille des Cactaceae (cactus), mais de celle des Agavaceae proche de celle des Liliaceae comme le lys, le muguet, la jacinthe, la tulipe et le narcisse.

La tequila

La (ou le) tequila ou téquila, est une eau-de-vie produite au Mexique exclusivement à partir d’une plante nommée Agave tequilana (contrairement au mezcal qui peut être produit à partir d’autres espèces d’Agave). Pour obtenir l’appellation « tequila », la production doit obligatoirement avoir lieu dans l’État de Jalisco et quelques municipalités des États de Nayarit, Michoacán, Guanajuato et Tamaulipas.

Le mot téquila vient de « téquitl » en náhuatl (langue amérindienne de la famille uto-aztèque) qui signifie « travail » ou « fonction » et de « tlan » qui signifie « lieu ». Le mot « tequio » se réfère aux travaux des champs.

La méthode Tahona, la façon ancienne de fabriquer la tequila

Les procédés traditionnels de tequila commencent par la cuisson des agaves pour convertir leurs amidons en sucres. Les cœurs ou « piñas » sont ensuite broyés et déchiquetés pour libérer leur jus. Ce liquide, appelé aguamiel, est ensuite fermenté et distillé.

Certaines des distilleries les plus volumineuses raccourcissent complètement ce processus. À la place, ils jettent des agaves déchiquetés non cuits dans une machine qui extrait les sucres à l’eau chaude. Le processus est très rapide et efficace pour extraire les sucres, mais la tequila qui en résulte n’a pas la complexité ou la saveur d’un alcool d’agave traditionnel.

Cependant, quelques marques artisanales comme Casa San Matias ou Fortaleza, et d’autres très connues comme Roca Patrón, adoptent des méthodes de production pré-industrielles, privilégiant la qualité avant la quantité. Le tahona est l’une de ces méthodes « anciennes », qui consiste en l’utilisation d’une énorme et lourde roue de pierre volcanique pour broyer les piñas d’agave.

Avant l’introduction des machines modernes, les distillateurs utilisaient des ânes pour tirer ces roues dans une fosse circulaire. Remplis d’agaves grillés, les tahonas les convertissaient en pulpe en tournant.

L’arrivée du train au Mexique a permis à l’industrie de la tequila de s’étendre vers d’autres destinations. Peu à peu, la tequila passe du statut de produit régional ou local à celui de produit national, puis international dans la seconde moitié du XIXᵉ siècle ; avec la modernisation du port de Veracruz, il s’exporte encore plus facilement.

Après la Seconde Guerre mondiale, la demande de tequila s’accroît fortement, si bien qu’en 1950 le nombre de champs d’agaves a augmenté de 110 % par rapport à 1940.

Depuis qu’elle s’exporte en quantité, la tequila ordinaire est devenue plus chère. La tequila n’a jamais été une boisson accessible aux Mexicains les plus modestes qui eux buvaient du pulque et lui préfèrent depuis les alcools dérivés de la canne à sucre, bien moins chers.

Dégustation

À la Mexicaine

  • Tequila et sangrita : créé dans les années 1920, consiste en un shot de tequila blanco accompagné d’un shot de sangrita boisson non alcoolisée dont il existe plusieurs variantes de la recette, mais la sangrita considérée comme authentique et originaire de Jalisco est faite à partir de jus de bigarade, lime et grenade, relevé par un mélange chili et une sauce piquante.
  • La Tequila peut aussi se boire en « banderita » (« petit drapeau » en espagnol), 3 caballitos (shots): 1 caballito de jus de citron vert, 1 caballito de tequila, 1 caballito de sangrita ; représentant ainsi le drapeau du Mexique. Le principe consiste à boire une gorgée de chaque caballitos, de garder la totalité dans la bouche avant d’avaler l’ensemble des trois gorgées.

À l’Américaine

  • La tequila paf, popularisée par les films des années 1940, consiste à consommer la tequila avec du sel et une rondelle de lime ou de citron, il s’agit de saupoudrer le dessus de la main gauche de sel et de placer le citron vert entre le pouce et l’index. On lèche le sel, on boit le verre de tequila d’un seul trait et on termine éventuellement en croquant dans le citron.

Ces ingrédients ajoutés aident à compenser la dureté d’une téquila de qualité médiocre et sont consommés dans un ordre spécifique.

En Allemagne et dans certains autres pays, la tequila oro (or) est souvent consommée avec de la cannelle sur une tranche d’orange après.

  • La tequila pampam ou Boom-Boom (Tequila Slammer), consiste à verser dans un verre type whisky environ de la tequila et autant de boisson gazeuse type limonade (7up, Sprite, Schweppes …) et éventuellement du sirop de grenadine.

Il peut également être servi avec de la tequila à parts égales, du vin blanc (ou du champagne) et de la limonade. Habituellement, on laisse environ un cinquième du verre vide pour permettre à la boisson de pétiller.

Couvrir hermétiquement le verre avec la paume de la main ou avec un sous bock, frapper le verre sur une surface dure (table, bar…) et boire d’un trait aussitôt.

L’action du claquement libère les bulles de gaz du mélange, le faisant mousser vigoureusement. Il s’échappera alors rapidement du verre s’il n’est pas bu immédiatement.

  • La tequila sunrise est un cocktail à base de tequila, de jus d’orange, et de grenadine qui au fond du verre donne l’effet d’un lever de soleil (sunrise) ce qui a inspiré le nom de la boisson.

La recette originale de 1930, était composée de : 5 cl de tequila ; 10 cl d’eau gazeuse ; 2 cl de jus de citron vert ; 2 cl de crème de cassis.

La recette actuelle la plus courante est composée de : 3/10 de tequila ; 7/10 cl de jus d’orange ; 1 trait de sirop de grenadine. Ou de : 6 cl de tequila ; 12 cl de jus d’orange ;2 traits de sirop de grenadine.

Le Mezcal

Le mezcal (ou mescal, du nahuatl mexcalli, qui signifie « agave cuit au four ») est une eau-de-vie élaborée au Mexique à partir de l’Agave, aussi appelé « pita », « maguey » ou « cabuya ». Contrairement à la tequila, pour le mezcal, toutes les variétés d’agave sont autorisées. Le degré de commercialisation minimum est de 36 °GL, il peut atteindre 55°.

Les normes mexicaines permettent la commercialisation de tequila ou de mezcal vieillis en fûts de chêne. Le blanco repose moins de deux mois en barriques, le reposado de deux mois à un an, l’añejo un an au minimum.

La meilleure qualité de mezcal et de tequila est celle produite uniquement à base d’agave. Les alcools dont l’étiquetage ne comporte pas la mention « 100 % agave » sont « coupés » (mixtos, en espagnol), c’est-à-dire que l’on a utilisé seulement 60 % d’alcool provenant des agaves pour leur élaboration, complété par de l’alcool provenant souvent de la distillation de la canne à sucre, beaucoup moins cher que l’agave.

La larve ou gusano

Les producteurs de mezcal ajoutent généralement une larve d’un papillon de nuit parasite de l’agave, l’Hypopta agavis (aussi appelée chilocuil, chinicuil, ou tecol, mots provenant du nahuatl).

Ces larves sont des chenilles et non des vers, (la confusion entre l’espagnol mexicain qui utilise généralement le terme « gusano » pour les chenilles et le castillan qui use du terme oruga) se nourrissent des feuilles succulentes du maguey.

La pratique de mettre une larve de chilocuil dans les bouteilles de mezcal est une astuce commerciale pour le différencier de la tequila (surtout à l’exportation) qui date des années 1940 : elle n’a rien de traditionnel et ne correspond à aucune coutume locale. Les larves proviennent de criaderos, c’est-à-dire d’élevages réservés à cet effet, séparés des plantations.

Le Canada a interdit l’importation de mezcal contenant des larves, pour des raisons sanitaires, car ces dernières contiennent un insecte mort mis à l’intérieur de la boisson.

Certaines distilleries remplacent la larve habituelle par un scorpion.

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