La Gaufre

Une gaufre est une pâtisserie confectionnée avec une pâte légère cuite dans un fer à gaufre (moule à gaufres, ou gaufrier) constitué de deux plaques métalliques, articulées entre elles par une ou plusieurs charnières, ornées de motifs qui s’impriment dans la pâte et lui donnent sa forme caractéristique avec des petits carreaux en creux. Les différents types de pâtes utilisées et la diversité de forme des motifs et des plaques font qu’il existe de très nombreuses variantes de gaufres.

Le moule s’est appelé, au fil du temps, challe, waffier, esimouère, moule à hostie, fer à gaufre, fer à oublie, moule à gaufre, moule à gaufrette, gauffrier et gaufrier.

C’est un mets typique de la Belgique, des Pays-Bas, du Nord de la France, des régions alpines d’Italie (Val d’Aoste et Escartons) et de Suisse romande.

Étymologie

Les étymologistes rattachent ce mot au francique « wafla ». Vers 1185, le terme « walfre » désigne une « sorte de pâtisserie cuite entre deux plaques divisées en cellules qui lui impriment un dessin en relief ». En 1433, le Compte de la bonne maison des Ladres, répertoriant les ustensiles de la cuisine, indique un fer à « waufres » mais le Ménagier de Paris utilisait déjà l’orthographe « gauffre ». Jean Nicot, dans son Trésor de la langue française en 1606, écrit « goffre » ; le Dictionnaire de l’Académie française, à partir de la 4e édition (1762) supprime le doublement du « f » tandis que Jean-François Féraud dans son Dictionnaire critique de la langue française, en 1787, ajoute un accent circonflexe (« gaûfre »).

Depuis le XIXe siècle, l’orthographe usuelle est « gaufre » et le genre est féminin, sauf dans certaines régions de la Suisse romande : Genève, Fribourg et Neuchâtel.

Synonyme

Plusieurs pâtisseries semblables à la gaufre ont porté un autre nom ; les textes et dictionnaires citent souvent plusieurs de ces noms comme définition de gaufre. La gaufre s’apparente donc :

  • au « mestier » servi au Moyen Âge en issue de table et à la « supplication » servie au boutehors ;
  • à l’« oublie » pour les Anglais, les Bretons, les Espagnols, les Italiens, les Néerlandais, les Russes ;
  • au « plaisir » pour un autre lexicographe espagnol ;
  • au « croquet » pour les Languedociens ;
  • à la « galette » pour les Ardennais (Belges), les Hesbignons et en wallon liégeois ;
  • et encore au « petit métier » ou aux « étriers » et « pridavaux » comme les cite Honoré de Balzac ou « bridaveaux » selon Liébaut.

Histoire de la gaufre et du gaufrier

L’origine de la gaufre n’est pas vraiment connue. Dans l’Antiquité, les Grecs cuisinaient des gâteaux plats, appelés obelias, entre des plaques de métal chaudes.

Les Romains préparaient une pâtisserie romaine appelée Crustulum. Celle-ci est une sorte de biscuits cuits dans des moules spéciaux en céramiques très fréquemment décorés.

Les premières utilisations de gaufriers ne sont pas réellement connues. Des moules à gaufre ronds, dépourvus de décoration, ont été retrouvés dans des sépultures des VIIᵉ et Xᵉ siècles de femmes Vikings en Suède et Norvège. Au IXᵉ siècle, un gaufrier ([ferrum] oblatorium) est mentionné en Normandie, qui peut avoir été utilisé pour cuire des hosties.

On trouve de nombreuses mentions de gaufriers dans les inventaires médiévaux et de très nombreux musées en gardent de beaux exemplaires. Ils étaient répandus en France aux XIIᵉ et XIIIᵉ siècles et à partir du XIVᵉ siècle, on les retrouve dans toute l’Europe occidentale et centrale. Aussi en Autriche, en Suisse et en Italie, il y a des fers très bien marqués.

Les premières machines à gaufres ont été conçues aux Pays-Bas vers le XIVᵉ siècle et ont été construites à partir de deux plaques de fer reliées à deux longues poignées en bois. Les plaques de fer avaient généralement des motifs décoratifs qui étaient ensuite reproduits sur la pâte cuite, notamment des blasons, des paysages ou des symboles religieux. Les gaufres étaient ensuite placées sur la flamme d’un foyer.

La convergence lexicale entre oublie et gaufre vient du fait que ces deux pâtisseries légères étaient cuites par les oublieurs entre deux plaques de fer, mais la mince oublie était roulée en cylindre ou en cornet, tandis que la gaufre reste habituellement plate. Il est difficile de déterminer à quelle époque cette convergence s’est faite.

Dès le XIIIᵉ siècle, on vendait au peuple dans les rues de Paris la gaufre à un demi denier.

Aux XIVᵉ et XVᵉ siècles, il est courant d’en faire à la maison, car cela constitue un mets habituel de l’alimentation paysanne : le Ménagier de Paris au XIVᵉ siècle en donne quatre recettes.

Jean La Bruyère-Champier écrit au XVIᵉ siècle : « Les gaufres sont un ragout fort prisé de nos paysans, Pour eux, du reste, il ne consiste qu’en une pâte liquide, formée d’eau, de farine et de sel. Ils la versent dans un fer creux, à deux mâchoires, qu’ils ont frotté auparavant avec un peu d’huile de noix, et qu’ils mettent ensuite sur le feu pour cuire la pâte. Ces sortes de gaufres sont très épaisses. Celles que les gens riches font confectionner dans leur cuisine sont plus petites et plus minces et surtout plus délicates, étant composées de jaunes d’œufs, de sucre et de fine fleur de farine, délayés dans du vin blanc. On les sert à table comme entremets. Quant à leur forme, on leur a donné celle de rayons. François Iᵉʳ les aimait beaucoup et possédait même, pour cet usage, des gaufriers en argent. »

Dans certaines régions, la gaufre a été l’aliment de base de la population, faite de farine de sarrasin pendant tout l’hiver, de farine blanche de froment pour les fêtes.

Les émigrés hollandais au Nouveau Monde y amènent les gaufriers au XVIIᵉ siècle.

Le 24 août 1869, l’Américain Cornelius Swarthout fait breveter un exemplaire de gaufrier à poser sur un poêle à bois ou à gaz. Ce jour est fêté aux États-Unis sous le nom de « Waffle day ».

En 1911, General Electric présente son premier gaufrier électrique. Bien que l’aspect global de la machine ait changé depuis lors, son design intérieur et sa fonction de base sont restées semblables.

En 1956, René Lagrange à Saint-Genis-Laval, près de Lyon, a inventé le premier gaufrier électrique à plaques interchangeables.

Au XXIᵉ siècle, la gaufre est toujours un mets de fête que l’on trouve dans toutes les kermesses, foires et braderies, mais elle est aussi l’un des éléments du (petit-) déjeuner aux États-Unis, un en-cas en Europe occidentale et un dessert un peu partout dans le monde. L’industrie fournit des pâtons frais ou surgelés.

L’oublie

Une oublie est une pâtisserie qui date du Moyen Âge. Mince et de forme ronde, elle est préparée à partir de farine et d’eau, de lait ou de vin blanc, d’œuf, de sucre ou parfois de miel. Elle est cuite entre deux fers par l’« oublieur », comme une gaufre, puis souvent roulée en cylindre creux. En Algérie, dans les années 1950, les vendeurs ambulants proposaient, en criant « marchand d’oublies », les oublies parisiennes.

Étymologie

Altération de l’ancien français oblaye, obleie, oblee (au XIIᵉ siècle), « oublie » vient du bas latin ecclésiastique oblata (hostia) « offrande, pain offert à l’eucharistie », féminin substantivé de oblatus « offert », spécialement « offert à Dieu, sacrifié », lui-même employé comme participe passé de offere (de ob ferre « porter devant ») ».

Selon d’autres lexicographes, le terme oublie pourrait remonter au mot grec obélias (qui a donné le terme obélie utilisé par Rabelais), désignant un pain, de forme allongée et étroite, cuit à la broche ou entre deux fers et vendu une obole pour être servi à la fin du repas et trempé dans du vin.

Le premier sens du mot fut celui de pain azyme utilisé pour la consécration de la messe. Au second sens, c’est la pâtisserie, d’abord préparée comme l’hostie, dont il est question dans cet article.

Origine

Pâtisserie très fine et à l’origine hostie non consacrée, cuite comme elle et comme la gaufre entre les deux plaques d’un fer, l’oublie date du Moyen Âge.

Encore en forme de pain allongé, elle fut d’abord servie, certains jours de jeûne et aux fêtes solennelles, aux chanoines, clercs et moines. Elle constituait un cadeau des curés aux évêques, comme des évêques et du pape aux souverains.

Les seigneurs en exigèrent ensuite de leurs vassaux jusqu’à ce que l’oubliage, cette redevance féodale, soit remplacé par le dépôt de gâteaux ou de pain plus raffiné (dit oubliau), puis par de l’argent.

L’oublie est vite devenue une pâtisserie populaire, vendue par les « oublieurs » près des églises, lors des fêtes, et dans les rues à la nuit tombée.

L’apparence de l’oublie dépend du fer dans lequel elle a été cuite et qui a imprimé un relief à la pâte. Les fers anciens étant fabriqués par des artisans et non en série comme les gaufriers modernes, la diversité des motifs est immense.

La corporation des oublieurs

La corporation des oublieurs (ou obloyers) reçoit ses statuts en mai 1270 sous Louis IX. Ils sont modifiés en août 1406 et en 1479.

Les chansons des oublieurs sont préférées à leurs gâteaux et les ambulants sont invités à pénétrer dans les maisons pour égayer la fin des soupers. En certains endroits, ces repas se déroulent avec une certaine licence et les chansons y prennent des accents grivois et orduriers qui provoquent les pourboires. Certains oublieurs en profitent pour repérer l’agencement des habitations et vendre ces informations à des voleurs, voire pour se transformer eux-mêmes en filous. « L’apprentissage d’oublayerie était, à vrai dire, un apprentissage de filouterie ». François-Joseph-Michel Noël écrit que le brigand Cartouche comptait des oublieurs dans sa troupe.

Au XVIᵉ siècle, sous Charles IX de France, les corporations des oublieurs et des pâtissiers sont réunies en une seule.

En 1722, une ordonnance va interdire de colporter les oublies ; un des moindres motifs est qu’elles sont ordinairement « défectueuses et indignes d’entrer dans le corps humain ».

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