Les œufs Bénédicte, de l’anglais eggs Benedict, sont une spécialité à base d’œufs, composée de moitiés de muffin anglais grillées, recouvertes d’une tranche de bacon frit, d’un œuf poché et nappées de sauce hollandaise. C’est un classique du brunch américain.
Appelés œufs bénédictine au Québec, son usage prête à confusion, car les Œufs à la Bénédictine, codifiés par Escoffier, sont des œufs pochés ou mollets sur une Brandade de morue légèrement truffée, placées sur des croûtes de tartelettes et nappés de sauce Crème. La référence monastique de cette appellation vient de ce que la morue était un vrai poisson de carême.
L’origine des œufs Bénédicte
Bien que la recette moderne semble bien d’origine new-yorkaise, selon l’Encyclopédie Larousse de la Cuisine, y voit un plat de Carême consommé par les moines bénédictins, la recette des Œufs à la Bénédictine, d’Escoffier, ainsi que le livre de cuisine anglais populaire, « le livre de gestion du ménage » de Mme Beeton de 1861, contient une recette de sauce hollandaise « à utiliser avec la bénédictine ». Il est donc fort probable que l’histoire des œufs bénédictine remonte plus loin que New York et la seconde moitié du XIXᵉ siècle. Selon Gregory Beyer du New York Times, l’actuelle recette serait davantage une évolution qu’une invention. Même là, sur son histoire contemporaine, beaucoup a été dit et écrit, mais peu chose ont été établies précisément. Les principaux témoins sont morts depuis longtemps. Un livre de cuisine en contredit un autre. Même l’Oxford English Dictionary semble hausser les épaules en disant simplement : « Origins US ».
Cependant, si l’origine new-yorkaise de la recette actuelle paraît bien établie, sa paternité fait débat.
L’une des affirmations les plus largement répandues serait que la serait née à l’hôtel Waldorf (de nos jours Waldorf-Astoria) de New York un matin de 1894. Selon une interview publiée en 1942 dans le magazine le « New Yorker », Lemuel Benedict (1867-1943), un courtier en valeurs mobilières à la retraite de Wall Street, a déclaré qu’il s’était aventuré un matin à l’hôtel Waldorf en 1894, dans l’espoir de trouver un remède à sa gueule de bois et demande un petit déjeuner consistant avec toasts grillés, œufs pochés, lard grillé et sauce hollandaise.
Le maître d’hôtel Oscar Tschirky trouve l’idée bonne et fait inscrire les œufs Benedict au menu du petit déjeuner et du déjeuner en procédant à quelques ajustements où il remplace notamment les toasts grillés par un muffin anglais et le lard par du bacon.
Jack Benedict, petit-cousin de Lemuel, travaille au rétablissement de la version traditionnelle. Il ouvre la même année le restaurant L.C. Benedict Restaurant & Tavern près de Denver, avec au menu les œufs Benedict façon Lemuel (avec toast et bacon) et les œufs Benedict façon Oscar (avec muffin anglais et bacon canadien).
En septembre 1967, une chronique du critique gastronomique Craig Claiborne paru dans le New York Times Magazine déclenche une vive polémique concernant la création des œufs Bénédicte en faisant état d’une lettre reçue d’un Américain résidant en France, Edward P. Montgomery écrivant que le plat a été créé par le Commodore Elias Cornelius Benedict, éminent banquier et plaisancier de New-yorkais décédé en 1920 à l’âge de 86 ans. Dans sa lettre, Edward P. Montgomery inclus une recette d’œufs bénédictine, mentionnant que sa mère lui avait appris, et qu’elle l’avait apprise de son frère, qui était, un ami du commodore. La recette dite du « Commodore Benedict » varie considérablement de la version traditionnelle, en particulier dans la préparation de la sauce hollandaise à laquelle on ajoute « un mélange de jambon et d’œufs durs ».
En novembre 1967, à la suite de cet article, une lectrice, Mabel C. Butler de Vineyard Haven, Massachusetts, répond dans un courrier via le New York Times Magazine, à Edward P. Montgomery, que la vraie histoire des « œufs Bénédicte » était bien connue des proches de la femme de LeGrand Benedict, dont elle était et avait été conçu au restaurant Delmonico.
Le Delmonico est restaurant fondé en 1827, dans le quartier financier de Manhattan et connu sa clientèle aisée et influente de la ville. À cette époque, le quartier était en pleine expansion, et de nombreux hommes d’affaires, avocats et politiciens y travaillaient. Il est considéré comme l’un des premiers restaurants de luxe des États-Unis et avait également une réputation de lieu de rencontre pour les artistes et les écrivains de l’époque, tels que Mark Twain et Oscar Wilde. Le Delmonico a par ailleurs contribué à populariser de nombreux plats de cuisine américaine, tels que le steak Delmonico, la salade Caesar et les œufs Bénédicte.
Quant à Monsieur LeGrand Benedict, il se peut que ce soit LeGrand Lockwood Benedict (1842 – 1912) un officier supérieur ayant participé notamment à la bataille de Gettysburg et reconvertis dans les affaires, originaire de l’État de New York.
L’histoire est la suivante : Le couple LeGrand Benedict, lorsqu’il vivait à New York à la fin du XIXᵉ siècle, mangeait tous les vendredis au Delmonico. Un jour, Mme Benedict a dit au majordome de l’hôtel : « N’avez-vous rien de nouveau et de différent à suggérer aujourd’hui ? ». Il a alors proposé des œufs pochés sur du pain grillé anglais et une tranche de jambon, le tout recouvert de sauce hollandaise.
Aujourd’hui encore, les menus du restaurant Delmonico dans le Lower Manhattan rappellent cette histoire et indiquent que les œufs Bénédicte ont été créés pour la première fois par le restaurant en 1860.
En 1978, une polémique née d’un article de presse attribue la recette des œufs Bénédicte à Charles Ranhofer, son livre The Epicurian (1893) mentionne un « jambon à la Benedict » mais sans traces d’œufs. Ceux-ci n’apparaîtront que l’année plus tard dans l’édition de 1894.
A la Benedict
Il semble qu’à l’origine l’expression « à la benedict » (avec ou sans majuscule) n’était pas employée uniquement avec des œufs. Aux États-Unis, le terme « benedict » est souvent utilisé pour faire référence à des plats simples et conviviaux, pris de manière informelle, sans formalités ni cérémonies, en quelque sorte similaire à l’expression « à la bonne franquette ».
En général, ces plats consistent en une base de muffin anglais ou de pain grillé, sur laquelle sont disposés des tranches de jambon, de bacon ou du saumon fumé, des œufs pochés, ainsi qu’une sauce hollandaise, qui est une sauce à base de beurre clarifié, de jaunes d’œufs, de jus de citron et de poivre de Cayenne. On y trouve notament : les œufs bénédicte (eggs Benedict), les muffins bénédicte (English muffin Benedict), le saumon bénédicte (salmon Benedict), ou encore le poulet bénédicte (chicken Benedict). Il existe aussi une recette de « jambon à la bénédicte » qui se compose d’une tranche de jambon, généralement du jambon blanc, nappée d’une sauce béchamel agrémentée d’œufs durs, de cornichons, de câpres et d’herbes aromatiques comme le persil et l’estragon.
Les variantes
Très populaire aux États-Unis et au Canada, les œufs Bénédicte sont appréciés en Grande-Bretagne ainsi que dans d’autres pays du monde. Ils sont souvent un élément standard du petit-déjeuner dans les hôtels internationaux et sa recette se décline en diverses déclinaisons : saumon, jambon, garniture d’asperges, de tomates, de truffes…
- Les œufs Blackstone : avec bacon et tranches de tomates.
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Les œufs Hemingway appelé encore Atlantique ou Royale : avec saumon ou saumon fumé au lieu de jambon (souvent trouvés en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Canada).
- L’Huevos Benedictos : avec avocat au lieu de jambon et avec de la sauce salsa en plus de la sauce hollandaise.
- Les California Eggs Benedict : ajoute des tranches d’avocat et ses variantes peuvent inclure des tranches de tomate au lieu du bacon canadien.
- Les œufs à la hussarde : avec biscottes en guise de muffins et sauce bordelaise
- Les œufs Balmoral : le haggis remplace le bacon.
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Les œufs à la florentine : avec épinards cuits à la vapeur à la place du jambon.
- Les œufs Neptune : la chair de crabe remplace le bacon.
- L’Irish Benedict : remplace le bacon par du corned-beef irlandais.
- Les œufs Mornay : la sauce Mornay remplace la sauce hollandaise.
- Omar Omar (Steak Benedict) remplace le bacon par un petit steak et remplace parfois la sauce hollandaise par de la béarnaise.
- Les œufs Beauregard : avec des biscuits au lieu de muffins, un mince hamburger (galette de saucisse) et une sauce paysanne.
- Les œufs Chesapeake (Crab Eggs Benedict, Crab Cakes Benedict) : du crabe bleu du Maryland remplace leu bacon canadien.
Les œufs Sardou
Les eggs Sardou (« œufs Sardou ») est un plat louisianais créole créé en l’honneur de Victorien Sardou, célèbre dramaturge français et montre l’influence des immigrés français au XIXᵉ siècle. Ils sont constitués d’œufs pochés, de fonds d’artichaut, d’épinards crémeux et de sauce hollandaise additionné d’un trait de Tabasco. Cependant, il n’est pas rare de trouver des variantes avec une sauce béchamel assaisonnée avec du sel, du poivre, de clous de girofle et de la noix de muscade. Ils peuvent aussi être servis avec des truffes, du jambon et des anchois.
Ils sont au menu de nombreux restaurants créoles à La Nouvelle-Orléans, notamment chez Antoine’s d’où le plat serait issu.
Antoine’s est un restaurant créole situé dans le vieux carré français de La Nouvelle-Orléans, aux États-Unis, au 713, rue St. Louis. Il a été fondé en 1840 par Antoine Alciatore, ce qui en fait le plus ancien restaurant des États-Unis à être dirigé par la même famille. Certains plats qui y ont été inventés ont acquis une notoriété internationale, comme les huîtres Rockefeller, le Pompano en papillote ou les œufs Sardou.