Le beignet
Un beignet ou beigne est un mets sucré ou salé fait d’une pâte assez fluide, frit dans l’huile.
En France, le terme « beignet » cache une grande variété d’aliments recouvert de pâte et frits, le plus souvent en forme de boule. Il existe des recettes de beignets aux pommes, beignets de champignons, beignets de pommes de terre, beignets de brocolis ou beignets de courgettes et ces plats peuvent avoir des noms différents selon les régions de France, comme les « Bugnes », les « Merveilles », les « Oreillettes », les « Beignets de Carnaval », les « Tourtisseaux », les « Corvechets », les « Oies » ou « Nouets ». En Corse, les beignets à base de farine de châtaigne sont appelés « fritelli ».
Étymologie
Le mot « beignet » est un diminutif du mot « beigne », qui date de la France du XIIIe siècle, où il désignait une boule de pâte frite dans du beurre. L’enflement de la pâte lors de la cuisson a donné, au sens figuré, la signification actuelle du mot d’argot français « beigne » : bosse à la suite d’un coup.
Alors qu’en France, seul le diminutif du mot beigne est toujours utilisé, en Amérique du Nord, on utilise encore le mot au sens propre. Personne ne semble savoir ni où ni quand s’est répandu l’usage de trouer la pâte afin d’en uniformiser la cuisson.
Histoire
Les aliments frits sont fréquents dans la Grèce antique et la Rome antique, où l’on utilise alors de l’huile d’olive. La première recette d’une pâte à beignet, l’aliter dulcia, est donnée par Apicius, dans son ouvrage De re coquinaria.
Dans les pays de religion chrétienne, avant la période de privation du carême, dite période de jeûne et qui dure quarante jours, il est de coutume de faire la fête et de manger « gras ». D’où « Mardi gras », qui est le jour précédant le carême. Comme la fête rassemblait un grand nombre de personnes, il fallait confectionner des pâtisseries vite préparées et bon marché. Il s’agissait aussi d’utiliser les réserves de beurre, huile, œufs, avant les quarante jours de jeûne qui allaient suivre. D’où la tradition des beignets et également des gaufres et des crêpes.
Ingrédients
Outre la farine, les œufs, l’huile ou le beurre, la pâte à beignet peut comporter aussi, depuis le XVIIIᵉ siècle, de la bière selon les régions ou les recettes. On peut utiliser pour leur confection des fleurs de violette, sureau, lys, fleur d’acacia, courge ou bourrache.
Les beignets peuvent être agrémentés de confiture (fraise, abricot) ou de pâte à tartiner au chocolat.
International
Dans le reste du monde francophone, le beignet emprunte plusieurs noms. Aux Antilles, c’est un beignet antillais. Au Canada francophone (au Québec et au Nouveau-Brunswick principalement), on dit « beigne » et ils ont la forme d’un anneau. On peut aussi trouver la variété « trou de beigne », qui est le bout de pâte retiré pour former le trou du beigne à l’ancienne. Aux États-Unis, en Louisiane, ils sont appelés « beignet cadien ». En Belgique francophone, ils sont appelés « croustillons ». En Suisse romande, « boule de Berlin », « merveilles » (proches des oreillettes).
Aux Pays-Bas, ils sont appelés « oliebol ». Au Portugal, « bola de Berlim », fourré à la crème d’œuf ou crème pâtissière. En Vallée d’Aoste, « merveilles » et dans le reste de l’Italie, « chiacchiere ». En Allemagne, le « Berliner Pfannkuchen », fourré de marmelade ou de différents types de crème. On retrouve cette pâtisserie en France sous l’appellation de « boule de Berlin ».
À Jersey, les merveilles sont les beignets traditionnels de cette île anglo-normande. À Madagascar, le « mofo tantely » est un beignet au miel.
En Turquie, le « pişi » est un beignet frit traditionnel de la cuisine turque.
En Tunisie, le « fricassé » et le « bambalouni » sont deux beignets traditionnels de la cuisine tunisienne, le second dérivé du « bombolone » italien. En Colombie, les beignets sont servis avec de la natillas.
Aux États-Unis, lors du XXᵉ siècle, la taille officielle du trou à l’intérieur du beignet a évolué en passant de 1,5 pouce en 1927 à 3/8 de pouce en 1948.
Le donut
Donut, ou doughnut, littéralement « noix de pâte », désigne un « beignet sucré » dont les deux types les plus courants sont le beignet fourré et le beignet en anneau, en Amérique du Nord (beigne au Canada francophone, nom masculin et beignet en Louisiane ainsi que pour les Acadiens).
La version la plus courante est de forme torique (semblable à un bagel), à texture dense, souvent couverte d’un glaçage, qui fut popularisée dans les années 1950 par les chaînes de restauration rapide.
Les donuts, ou beignes, peuvent parfois être fourrés d’une préparation crémeuse, ce qui les apparente au zeppola italien, ou encore de confiture. Ils s’accompagnent généralement d’un café. Les petits donuts de forme sphérique sont appelés donut holes, ou « trous de beigne » au Canada.
Terminologie
Les termes anglais de donut, ou doughnut et franco-canadien de beigne, peuvent occasionnellement désigner toutes formes de beignets sucrés. Cependant, l’expression « doughnut shape » ou « en forme de beigne » veut dire de forme annulaire, en référence à la version la plus populaire.
En ancien français, beigne est la base morphologique dont est dérivé le beignet, diminutif moderne. Pourtant, et selon le Dictionnaire étymologique du français de Jacqueline Picoche, dans la collection des « Usuels du Robert », le mot « beigne » est postérieur à « beignet » puisque les premières attestations de beigne datent du XIVᵉ siècle alors que beignet est apparu dès le XIIIᵉ siècle (page 61 de l’ouvrage). Le Dictionnaire étymologique et historique du français (Larousse, p. 74) précise que « beigne » serait apparu en 1378 sous la forme « buyne » et que « beignet » date du début du XIIIᵉ siècle (buignez) ; la forme courante dans le Sud-Est de la France est d’ailleurs « bugne ».
La première attestation du mot « beigne » au Québec a été consignée par le père jésuite Pierre-Philippe Potier dans un lexique rédigé entre 1743 et 1758. En 1855, le terme apparaît sous la graphie « baigne » qui est celle qui sera reprise en 1877 par un auteur anglophone.
Histoire
Il n’y a pas d’accord sur l’origine de cette pâtisserie. Il faut distinguer les recettes de beignets arrivées d’Europe avec les colons, probablement dès le XVIIᵉ siècle, des recettes du populaire beigne de forme annulaire, plus contemporain, mais dont l’origine demeure obscure. Les premiers beignets seraient arrivés en Amérique au XVIIᵉ siècle avec les colons des Pays-Bas et leurs « oliebollen » (« boules cuites dans de l’huile ») inspirée d’une recette allemande du XVᵉ siècle publié à Nuremberg en 1485 dans le livre de cuisine « Küchenmeisterei » (Maîtrise de la cuisine), propose une recette de « Gefüllte Krapfen », des gâteaux de pâte frite farcis et sans sucre, bein qu’une autre hypothèse voudrait qu’ils soient introduits aux Pays-Bas au XVᵉ siècle par des immigrants juifs séfarades portugais. La première recette découverte d’oliekoecken (l’ancete de l’oliebol) provient du livre néerlandais de 1667 « De verstandige kock » (Le cuisinier sensé).
L’introduction du beignet est également revendiquée au XVIIIᵉ siècle par les Québécois comme par les Louisianais. La première référence au terme « doughnut » dans un livre de cuisine anglo-américain remonterait à 1803 selon Paul R. Mullins, auteur du livre Glazed America : A History of the Doughnut.
L’Américain Hanson Gregory prétend avoir inventé la forme annulaire en 1847. Enfin, le tabloïd Daily Mail avance en 2013 l’hypothèse d’une origine britannique, dans les années 1800-1810.
Originaire des Pays-Bas espagnols
En 1809, le terme « dough-nut » est utilisé dans le livre de Washington Irving « A History of New York, from the Beginning of the World to the End of the Dutch Dynasty » :
« Parfois la table était ornée d’immenses tartes aux pommes ou de soucoupes pleines de pêches et de poires confites ; mais il était toujours sûr de se vanter d’un énorme plat de boules de pâte sucrée, frites dans de la graisse de porc, et appelées beignets, ou oly koeks : une délicieuse sorte de gâteau, actuellement peu connu dans cette ville, sauf dans les véritables familles hollandaises. »
Le terme « oly koeks » est certainement lié à l’« oliekoek » : un beignet hollandais sucré et frit à l’origine dans du saindoux et non dans l’huile. Au cours du XIXᵉ siècle, le mot « oliebol » a commencé à le remplacer pour complètement s’y substituer aujourd’hui.
Il est connu en Belgique néerlandophone sous le nom de smoutebol (boule cuite dans le saindoux, au pluriel smoutebollen, du néerlandais smoutbollen), pour la même raison, il est nommé Schmalzkugel (au pluriel Schmalzkugeln) en Belgique germanophone. Même sens dans le patois bruxellois « smoutebolle » (au pluriel smoutebolles) ou, plus affectueusement, smoutebolleke (« boulette cuite dans le saindoux », au pluriel smoutebollekes).
Il est appelé croustillon en Belgique francophone (crostilion en wallon). À Liège, il est parfois nommé « soupir de nonne » ou « pet-de-nonne ».
En France, on retrouve ces pâtisseries dans le Nord de la France, en Picardie, en hiver, sur les marchés de Flandres et d’Artois. Elles ne doivent pas être confondues les « croustillons hollandais » vendu dans les fêtes foraines, spécialité certes françaises, mais à l’appellation impropre. Ces croustillons y sont aussi connus sous le nom de « beignets rapides ». En Alsace, les croustillons sont appelés « pupperle ».
Beignet en Louisiane
La préparation des beignets (fritters ou square French donuts) est arrivée en Louisiane avec la colonisation française. Il est possible que la recette ait été amenée par les ursulines en 1725, mais rien ne l’atteste. La version la plus connue aujourd’hui du beignet louisianais est celle proposée par le Café du Monde, fondé en 1862 dans le quartier français du Vieux carré à La Nouvelle-Orléans.
Beigne au Québec
Les Québécois ont traditionnellement cuisiné le beigne à l’ancienne, avant l’existence des chaînes de restauration spécialisées comme Tim Hortons. La recette francophone la plus ancienne attestée du beigne se trouve dans le livre de 1840 « La cuisinière canadienne » qui est aussi, d’après la Bibliothèque et Archives nationales du Québec, « le premier livre de recettes écrit et publié au Québec ».