Histoire de la liberté d’association et du mouvement associatif

La Liberté d’association

La liberté d’association n’est pas un droit datant u XIXe siècle, mais remonte au fondement de notre civilisation. Il consiste en la possibilité de former ou de rejoindre un groupe pour une durée prolongée. C’est le droit de constituer, d’adhérer et de refuser d’adhérer à une association.

Liberté d’association dans le monde

Plusieurs textes internationaux reconnaissent la liberté d’association :

  • En 1948, l’Assemblée générale des Nations unies proclame dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme le droit de s’associer librement ;
  • En 1950, la Convention européenne des droits de l’homme consacre la liberté de réunion et d’association ;
  • En 1966, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques garantit le droit de s’associer librement ;
  • En 1981, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples consacre la liberté d’association et condamne toute adhésion associative obligatoire comme une violation de ce droit fondamental, sous réserve de l’obligation de solidarité ;
  • En 1990, la Convention internationale des droits de l’enfant consacre la liberté d’association des mineurs ;
  • En 1999, la Cour européenne des droits de l’Homme condamne toute adhésion associative obligatoire comme étant contraire à la Convention européenne des droits de l’homme.

Histoire de la liberté d’association et du mouvement associatif en France

De la Grèce antique à la révolution française

L’association volontaire est connue dès la Grèce antique (IVᵉ av J. C.), sous le terme d’hétairie (hetaireia, = association d’amis, de compagnons), qui désigne un club aristocratique d’une cité.

À partir du début du IIe millénaire, les villes se développent en Occident. L’artisanat se renforce en milieu urbain. Le besoin de s’associer est né de la volonté de partager des savoir-faire entre personnes exerçant un même métier.
Sous la Rome antique, connu sous le nom de collège (collegium) et de corporation, elle sert à des buts d’ordre public ou privé, reconnue par la loi et dotée de la personnalité légale.

Puis au Moyen Âge, les associations de bénévoles sont connues sous le nom de guildes.

Vers le XIIᵉ siècle, apparaissent les guildes corporatives, communautés de métiers souhaitant définir leurs devoirs et faire valoir leurs droits. Tandis que d’autres s’organisent en confrérie avec des buts commerciaux et philosophiques. Ces communautés étaient réglementées d’une façon plus ou moins homogène selon les villes.

Au fil du temps, les guildes, quelles qu’elles soient, vont gérer tous les aspects de la société médiévale.
Sous l’Ancien Régime (XVIᵉ au XVIIIᵉ siècle), le terme société est consacré aux associations volontaires de personnes dont le but est commercial, et celui de communauté aux autres. Il existe aussi de nombreuses associations récréatives ou clubs qui restent informelles et officieuses.
Les communautés qui sont considérées comme d’intérêt public, comme les communautés professionnelles, les associations d’assistance, les communautés d’habitants, les confréries charitables, ont leurs statuts publiés comme lettres patentes, ce qui est l’équivalent actuel d’un décret pris en conseil d’État.
Les monarchies successives se méfient de ces réseaux organisés susceptibles de constituer des contre-pouvoirs. L’attitude de l’autorité royale varie entre la mise sous tutelle des associations dont elle reconnaît l’utilité avec l’octroi de privilège et la répression de celles susceptibles de représenter une menace.
Pendant le siècle des Lumières (1715-1789), les économistes libéraux y voient un frein au développement, les partisans des idées révolutionnaires les jugent anachroniques. L’esprit des Lumières amalgame les structures institutionnalisées archaïques et les associations d’entraide volontaire.

La Révolution

L’Assemblée nationale consacre d’abord pleinement « le droit de s’assembler paisiblement et de former entre eux des sociétés libres, à la charge d’observer les lois qui régissent tous les citoyens. », par la loi du 21 août 1790.
Avec l’abolition des privilèges qui supprime les financements publics et avantages fiscaux et suite à des troubles ouvriers et la montée des revendications salariales, l’Assemblée nationale dissout toutes les communautés religieuses, d’habitants, de métiers, les collèges, les hôpitaux, les confréries charitables, les congrégations, qui étaient innombrables, et interdit, par le décret d’Allarde (2 et 17 mars 1791) et la loi Le Chapelier (14 juin 1791), de reformer des associations d’ouvriers ou d’habitants pour défendre leurs intérêts collectifs.
De ce fait, la révolution porte un coup de grâce au monde associatif, même si la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 évoque, dans son article II, la notion d’association, c’est pour parler d’« association politique » dont « le but est de conserver les droits naturels et imprescriptibles de l’homme », pas du tout d’associations d’intérêt privé, éducatives, culturelles, charitables ou cultuelles, qui vont rapidement être proscrites.

Le XIXe siècle et la reconquête de la liberté de s’associer

Avec le XIXᵉ siècle, le monde associatif se cristallise autour des thèmes du droit ouvrier et de la liberté d’expression.
À partir de 1810, le code pénal réglemente la liberté d’association : « Nulle association de plus de vingt personnes […] Ne pourra se former sans l’agrément du Gouvernement. » Mais malgré la loi, les associations ouvrières, clubs politiques et sociétés secrètes se multiplient.
En 1848, le décret du 28 juillet autorise les réunions des clubs et des associations ouvrières sur simple déclaration et publicité des séances et maintient l’interdiction des sociétés secrètes.
Avec le Second Empire (1852 – 1870), le régime de l’autorisation préalable est rétabli. Par la suite, une succession de travaux parlementaires vient assouplir les interdictions en place :

  • En 1864, abolition du délit de coalition autorisant ainsi les grèves sous conditions
  • 1867, reconnaissance des coopératives ouvrières
  • 1868, la loi distingue la différence entre le droit d’association et le droit de réunion et reconnaît ce dernier, sans autorisation préalable, tant que l’on n’y traite pas de questions religieuses ou politiques.

Sous la IIIᵉ république

  • La loi du 12 juillet 1875, permet la création d’associations en vue de l’organisation de l’enseignement supérieur
  • La loi du 30 juin 1881 instaure la liberté de réunion, sur simple déclaration, tout en maintenant l’interdiction des clubs politiques.
  • La loi du 22 mars 1884, dite loi Waldeck-Rousseau, autorise la constitution libre des syndicats professionnels et abroge ainsi définitivement la loi Le Chapelier.
  • Le 1er avril 1898, la même loi s’étend aux associations de secours mutuel.
  • En 1899, Pierre Waldeck-Rousseau, alors Président du Conseil, Ministre de l’Intérieur et des Cultes, dépose le projet de loi qui aboutira à la loi du 1er juillet 1901.
  • Celle-ci votée en 1901, au terme d’une longue bataille parlementaire, la loi « relative au contrat d’association », cette loi consacre le droit à toute personne en mesure de contracter de s’associer sans autorisation préalable. En faisant du droit de s’associer un contrat, la loi garantit que l’appartenance à une association reste tributaire du consentement de chacun. Les seules limites concernent « un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement ».
  • En 1905, un régime spécifique est créé pour les associations religieuses par la loi de Séparation des Églises et de l’État

Histoire de la loi Waldeck-Rousseau sur les associations

Dès le début du XIXᵉ siècle, le débat sur la liberté d’association se développe dans les milieux intellectuels et au parlement. À partir de 1864, une succession de travaux parlementaires vient assouplir les interdictions en place. La loi relative à la création des syndicats professionnels ou loi Waldeck-Rousseau votée le 21 mars 1884.

À la fin du XIXe siècle, le régime répressif en vigueur est devenu inadapté : un grand nombre d’organisations se sont développées malgré l’interdiction, sans que leurs objets constituent des menaces pour l’ordre public.

En 1900, l’Office du travail dénombre 45 148 associations en France (hors associations politiques et religieuses). Pierre Waldeck-Rousseau, alors Président du Conseil, Ministre de l’Intérieur et des Cultes, dépose en novembre 1899 le projet de loi qui aboutira finalement à la loi du 1er juillet 1901.

Les débats sont houleux et passionnés. Ils ne portent plus sur le principe de la liberté d’association, mais surtout sur le statut des congrégations religieuses en droit français. Waldeck-Rousseau propose de les soumettre au droit commun, mais, en raison de leur influence et de leurs puissances, le parlement ne souhaitait pas qu’un statut souple des associations soit utilisé par des congrégations ; il préfère les soumettre à l’autorisation préalable de création. C’est la raison pour laquelle un titre spécifique leur est consacré dans la loi.

Votée le 1er juillet 1901, la loi consacre le droit de toute personne en mesure de contracter de s’associer sans autorisation préalable. En faisant du droit de s’associer un contrat, la loi garantit que l’appartenance à une association reste tributaire du consentement de chacun. Les seules limites concernent « un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement ». Le régime spécifique des congrégations religieuses mène à la création de l’association cultuelle et de l’association diocésaine régie par la loi de 1905 (loi de Séparation des Églises et de l’État). En limitant la capacité des associations à posséder des biens fonciers, la loi prévient la constitution de grands domaines par droit de mainmorte.

Au XXᵉ siècle

Par la suite, la liberté d’association devient un droit constitutionnel reconnu par les traités internationaux.
Dont en 1948, la liberté d’association est reconnue comme un droit fondamental par l’article 20 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

En France, dans les années 1950, il se crée environ 5 000 associations chaque année. Ce nombre double ensuite tous les dix ans pour atteindre 20 000 par an en 1992.
En France, en 1971, le Conseil constitutionnel affirme et reconnaît dans sa décision du 16 juillet 1971 son caractère de liberté publique.

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