La crêpe est un mets composé d’une couche plus ou moins fine de pâte, faite à base de farine et d’œufs agglomérés à un liquide (lait, parfois mélangé à de l’eau ou de la bière), sans levain. Elle est généralement de forme ronde.
La crêpe se mange chaude ou froide, sucrée ou salée (ou nature), comme plat principal ou comme dessert, mais peut aussi constituer un en-cas. Elle est servie telle quelle, agrémentée d’une garniture ou encore fourrée. Selon les habitudes et la garniture, elle peut être d’épaisseur variable.
On la déguste chez soi ou au restaurant, et on en trouve à emporter sur les marchés, lors d’événements festifs, comme dans les fêtes foraines. En Europe francophone, elle est associée aux fêtes de la Chandeleur ou au Mardi Gras.
Certains types de crêpes sont devenues des spécialités définies : crêpe bretonne, galette de sarrasin, vôte, etc.
Étymologie
L’adjectif d’ancien français cresp « frisé, ondulé » est issu du latin crĭspus. Substantivé au féminin, il a pris le sens de « genre de pâtisserie » attesté au XIIIᵉ siècle. En effet, la crêpe est caractérisée par les ondulations que fait la pâte finement étalée lors de sa préparation.
Histoire
L’origine de la crêpe est incertaine et se perd dans la nuit des temps. Elle semble avoir été associée et consommée lors des fêtes romaines des Lupercales ou Lupercalia, puis de la Chandeleur. Ces fêtes marquent le moment de l’année où les jours s’allongent de plus en plus vite et l’arrivée du printemps et semailles.
Tout comme les Romains, les Celtes prient leurs divinités avec des flambeaux afin que les terres soient très fertiles. Ces célébrations ne sont pas sans rappeler une tradition celte nommée « Imbolc » qui se déroule le 1er février. Cette fête marque la fin de l’hibernation de l’ours et l’allongement de la durée du jour. Les traditions liées au réveil des animaux dits « dormeurs », selon les pays et les latitudes, l’animal attaché à ce folklore change. C’est à l’ours à qui la majorité de ces traditions est attachée, mais d’autres animaux peuvent y être associés comme le loup, la loutre, le hérisson, etc.
Dans les Pyrénées, en Bigorre, on disait qu’à la Chandeleur, l’ours sortait de la grotte dans laquelle il hibernait, inspectait le ciel, et si celui-ci était dégagé, retournait dans son gîte pour quarante jours.
Le début du printemps est la période où l’on commence à semer dans les champs : il faut donc commémorer cette date et demander aux dieux des sols prospères.
Les crêpes avec leur forme ronde et leur couleur dorée rappelleraient le Soleil enfin de retour après la nuit de l’hiver, ce qui expliquerait que l’on confectionne des crêpes à la Chandeleur.
Les Lupercales
Fêtes de purification annuelle, célébrées à Rome chaque année, le 15 février, comportant un sacrifice et un banquet dans lequel aurait été consommée notamment des crêpes. Ces festivités se déroulaient, près d’une grotte nommée le Lupercal, où selon la légende, Remus et Romulus auraient été allaités par la louve (située au pied du mont Palatin et probablement découverte en novembre 2007), en l’honneur de Lupercus (Faunus), dieu de la fécondité, de la forêt et des troupeaux, et dont l’épisode le plus important était la course qu’exécutaient, à moitié nus, les prêtres (les luperques) ayant accompli ce sacrifice autour du Palatin, et durant laquelle ils flagellaient les passantes à coups de lanières de cuir, cette pratique passant pour assurer leur fécondité.
La Chandeleur
Au Ve siècle, le pape Gélase Ier contribue à répandre et à christianiser ce culte païen et latin en instituant la « fête des chandelles » (ou « festa candelarum » selon l’expression latine). Il faisait distribuer des crêpes aux pèlerins arrivant à Rome, à l’instar des Vestales, qui lors des Lupercales, faisaient l’offrande de gâteaux préparés avec le blé de l’ancienne récolte pour que la suivante soit bonne.
Fête religieuse chrétienne correspondant à la présentation de Jésus au Temple (ou Sainte Rencontre) et à sa reconnaissance par Syméon comme « Lumière qui se révèle aux nations ». Cette fête, depuis 1372, est également associée à la Purification de la Vierge Marie, autrement dit ses relevailles.
Le pape organise ainsi des processions, d’abord au flambeau, puis remplacé par des chandelles bénites dont la lueur est supposée éloigner le mal et rappelle que le Christ est la lumière du monde. Les chrétiens rapportent ensuite les cierges chez eux afin de protéger leur foyer. À cette occasion, toutes les bougies de la maison doivent être allumées.
Bien que le pape Gélase Ier soit contribué répandre la fête de la Chandeleur, il semble qu’elle ait plutôt pris de l’importance à la suite de la peste de Justinien en 541 avant de se répandre lentement en Occident. Les Lupercales et la Chandeleur sont liées, sans doute en raison de leur visée purificatrice commune.
Traditionnellement, La Chandeleur se célèbre 40 jours après le réveillon de Noël, soit le 2 février. De nos jours, en France, en Belgique et en Suisse romande, on mange traditionnellement des crêpes dans une ambiance festive le jour de la Chandeleur.
Le jour de la marmotte
Aux États-Unis et au Canada, la célébration de la Chandeleur a généralement été remplacée dans les médias par le « jour de la marmotte » (rappelant le réveil de l’ours) bien que la tradition de la Chandeleur persiste encore sous ce nom dans plusieurs régions où les traditions françaises demeurent vivaces, comme au Québec, en Acadie, en Louisiane, dans la vallée du Mississippi et dans le Maine.
Le jour de la marmotte (Groundhog Day en anglais) est une tradition d’origine européenne liée au réveil des animaux dits « dormeurs ». En prenant pied sur le continent américain par les émigrants, la tradition s’est attachée à l’animal hibernant le plus répandu, la marmotte.
L’origine viendrait des régions germaniques d’Europe du Nord où, dans la religion populaire, diverses traditions et superstitions continuent d’être liées à la fête de la Chandeleur, bien que cela ait été dénoncé par les réformateurs protestants au XVIᵉ siècle. Notamment, plusieurs traditions apparentées aux traditions météorologiques utilisent le temps à la Chandeleur pour prédire le début du printemps. L’animal prédicteur traditionnel du temps à la Chandeleur était l’ours ou le renard, mais quand ils se sont raréfiés, la tradition a été modifiée par un autre animal, généralement le blaireau.
Au XVIIᵉ siècle, de nombreux immigrants luthériens d’origine suédoise, allemande et néerlandaise s’installent dans le delta du fleuve Delaware et fondent la Pennsylvanie. Ils y importent leur tradition du « Dachstag » (Jour du blaireau) et qui deviendra le Groundhog Day qui, selon la tradition, à la Chandeleur, on doit observer l’entrée du terrier d’une marmotte. Si elle émerge et ne voit pas son ombre parce que le temps est nuageux, l’hiver finira bientôt. Par contre, si elle voit son ombre parce que le temps est lumineux et clair, elle sera effrayée et se réfugiera de nouveau dans son trou, et l’hiver continuera pendant six semaines supplémentaires.
Mardi gras
Dans la Rome antique, on fêtait déjà l’arrivée du printemps avec les Calendes de mars, qui étaient l’occasion de se déguiser et de transgresser les interdits.
Dans la tradition chrétienne, le mardi gras marque la fin de la « semaine des sept jours gras » et l’entrée dans le Carême. (Du latin populaire quaresĭma, altération de quadragesĭma (sous-entendu dies) « quarantième jour », le Carême se situant quarante jours avant Pâques.)
Période de 40 jours durant laquelle les chrétiens mangent « maigre ». Mardi gras précède donc le mercredi des Cendres, premier jour de la période Pascale. Cette journée est ainsi l’occasion de vider les réserves et de manger tout ce dont on sera privé pendant plusieurs semaines. Elle se situe de ce fait juste avant la période de jeûne, c’est-à-dire avant le « Carême-entrant », ou le « Carême-prenant ». Les « sept jours gras » se terminent ainsi en apothéose avec le Mardi gras et sont l’occasion d’un défoulement collectif durant lequel tout est permis. On se déguise, on dissimule son visage derrière un masque, et on s’affranchit des contraintes sociales et de la bienséance. L’esprit d’austérité, de jeûne et d’abstinence qui s’annonce est momentanément mis entre parenthèses avec le carnaval.
Traditionnellement, Mardi gras, est aussi le jour où :
- On déguste des crêpes (composées d’ingrédients « gras » comme les œufs, le beurre), des gaufres et surtout des beignets de carnaval.
- Les enfants se déguisent ou demandent aux voisins dans les villages des œufs, du sucre, de la farine, etc., pour confectionner des gâteaux ou des crêpes qui sont mangés en fin d’après-midi.
Traditions anglo-saxonnes : Dans les pays du Commonwealth, les traditions sont différentes, mais apparentées au Mardi gras latin, sous le nom de Shrove Tuesday (mardi de l’absolution, du verbe archaïque to shrive, « absoudre »).
Au Canada et aux États-Unis, cette fête traditionnelle est aussi appelée Pancake Tuesday. Plusieurs églises offrent des petits déjeuners ou des dîners de pancakes, en sollicitant parfois des contributions caritatives. Les pancakes sont dégustés avec du sirop d’érable ou de la compote de fruits.
Périodes du carnaval
Le mot Carnaval est un emprunt à l’italien carnevale ou carnevalo. Il a pour origine carnelevare, un mot latin formé de carne « viande » et levare « enlever ». Il signifie donc littéralement « enlever la viande » et donc « entrer dans le carême ».
D’après le calendrier religieux, le carnaval débute à l’Épiphanie (le 6 janvier), date qui marque la fin des fêtes de Noël et s’arrête le mardi gras, veille du début de la période de carême.
Les Lupercales des Romains et les fêtes dionysiaques en Grèce sont des précédents historiques du carnaval.
À la Nouvelle-Orléans, le carnaval est nommé Mardi gras (en français dans le texte) et reste une tradition très marquée. Les défilés sont accompagnés par les marching bands typiques de la musique de la région.
Les différentes crêpes
On distingue les crêpes de couleur claire préparées à partir de farine de froment, de lentille, de maïs, de riz, de semoule, de teff ou de pois chiche, et celles, beaucoup plus brunes, réalisées avec de la farine de sarrasin (ou farine de blé noir).
Une crêpe s’obtient en étalant une portion de pâte, sous la forme d’un disque, sur un ustensile de cuisine préalablement graissé et chauffé (plaque de fonte, crêpière, poêle ou billig), et en la faisant cuire alternativement sur ses deux faces.
- Pour les crêpes de froment consommées en dessert, les ingrédients généralement utilisés pour la pâte sont la farine, les œufs, le lait (ou l’eau), le sucre et parfois du cidre ou de la bière. On y ajoute occasionnellement des arômes comme de la vanille, de la fleur d’oranger, du Grand Marnier ou de l’alcool de cidre (lambig, calvados) ou de rhum.
La crêpe française se prépare sans levain, contrairement par exemple au pancake américain, au mlyntsi ukrainien ou au blini.
- Pour les crêpes de blé noir, les ingrédients de base sont la farine de blé noir, l’eau et du sel. On y rajoute occasionnellement de la bière, un peu d’huile, d’autres farines en quantité moindre (froment, châtaigne) et du poivre. Cependant, chaque crêpier / crêpière a sa propre recette.
Consommation
La crêpe peut se consommer seule, mais est souvent couverte d’une garniture telle que du sucre, de la confiture, du chocolat à tartiner, de la crème chantilly, du fromage, du jambon, voire des légumes cuits et assaisonnés. La garniture est plus fréquemment sucrée pour les crêpes de froment et plutôt salée pour les crêpes de sarrasin.
La crêpe peut aussi être fourrée et gratinée au four. Elle se présente pliée en quatre, roulée, en demi-lune, en triangle, en pannequet (la garniture est placée au centre et on rabat deux bords opposés puis les deux autres pour former un petit paquet) ou « en aumônière ».
Elle peut être aussi utilisée comme base d’autres recettes (exemples : le gâteau de crêpes ou la ficelle picarde).
On peut aussi la flamber : on verse sur la crêpe chaude un alcool chauffé (souvent du Grand Marnier ou du rhum) auquel on met le feu. Ces crêpes sont servies immédiatement, généralement encore en train de flamber dans l’assiette. On peut accompagner d’une boule de glace (habituellement parfumée à la vanille).