La saga Campari

Campari est une entreprise italienne et le nom de marque de sa liqueur, crée à Sesto San Giovanni, à proximité de Milan dans la seconde moitié du XIXᵉ siècle et produisant un amaro : un amer (bitter) de couleur rouge rubis, parfumé avec de l’écorce d’orange et diverses herbes aromatiques lui donnant un arôme intense. En raison de son goût majoritairement amer, il est vendu sous l’appellation commerciale Bitter et est surtout utilisé comme apéritif dans les long-drinks ou les cocktails.

Gaspare Campari

Né en 1828 à Cassolnovo dans l’ancienne province de Novare, Gaspare Campari, était le dixième enfant d’une famille d’agriculteurs. En 1842, à l’age de 14 ans, il s’installe à Turin où il commence à travailler comme serveur. Il y développe un vif intérêt pour les habitudes de consommation de ses clients et approfondi sa connaissance des liqueurs et des spiritueux. À cette époque, il rencontre Teofilo Barla, maître pâtissier de la Maison de Savoie, qui l’a recommandé à Giacomo Bass comme apprenti dans sa célèbre boutique d’alcools et de confiseries de la Piazza Castello à Turin.

En 1850, il retourne à Novare où il loue « il Caffè dell’Amicizia » (le Café de l’Amitié), situé entre le Corso Cavour et le Corso Italia, à l’époque appelé Angolo delle Ore. Dans l’arrière-boutique, il installe un laboratoire dans lequel il crée des élixirs, des cordiaux (boissons tonifiante et stimulante), des liqueurs à la crème et des amers. Grâce à ses études et ses expérimentations, il découvrira des liqueurs au goût novateur et au nom souvent extravagant : Elisir di Lunga Vita, Olio di Rhum, Liquote Rosa. Parmi les liqueurs les plus réussies, il y avait le « Bitter all’uso d’Hollanda » dont il gardait la recette confidentielle et qui contenait plus de 60 ingrédients naturels, dont des herbes, des épices, des écorces et des écorces de fruits. Cet apéritif est devenu si populaire qu’il a valu le surnom de « Bitter del Signor Campari » et de s’appeler finalement « Bitter Campari ». L’entreprise connaît un vif succès puisque son nom est mentionné dans un guide de la ville dès 1861.

En 1862, Gaspare Campari se remaria avec Letizia Galli et déménagea avec elle dans sa ville natale, Milan, la même année. Là, il a repris le Caffè Amicizia du Palazzo Coperto dei Figini sur la Piazza del Duomo, situé en face de la cathédrale de Milan.

Le « Coperto dei Figini » était un palais de la Renaissance construit en 1467 et reconvertis en galerie et devint un lieu de rencontre pour les Milanais pendant près de 400 ans. Il abritait de nombreux magasins transformés peu à peu en cafés et en bars. Le « Coperto dei Figini » fut démoli en 1864 afin de laisser place à la « Galleria Vittorio Emanuele II ».

Après la démolition du palais en 1864, Campari a réemménagé avec sa famille dans la toute nouvelle Galleria Vittorio Emanuele II où il ouvre le Caffè Campari situé au coin de la galerie en 1867.

À sa mort en 1882, son épouse, Letizia Galli, reprend les rênes de l’entreprise familiale, avant de les transmettre plus tard à ses fils Davide et Guido.

Galleria Vittorio Emanuele II

Le choix de son emplacement pour son nouveau bar, le « Caffè Camparino », près du Duomo (dôme de Milan) la cathédrale de la ville, coïncide avec l’ouverture le 15 septembre 1867 de la Galleria Vittorio Emanuele II. Celle-ci est une galerie commerçante de prestige de style néo-classique à tendance baroque du XIXᵉ siècle, exemple les plus célèbres de l’architecture métallique européenne, elle représente l’archétype de la galerie marchande du XIXᵉ siècle. Elle constitue une rue piétonne couverte, un passage, reliant la Piazza Duomo (place du Dôme) à la Piazza della Scala (place de la Scala, l’opéra de Milan). Appelée simplement « la Galleria » (la Galerie) par les Milanais, par la présence de boutiques et de clubs élégants, elle a été depuis son inauguration le lieu de rencontre de la bourgeoisie milanaise, à tel point qu’il a été surnommé « il salotto di Milano » (le salon de Milan).

Caffè Camparino

Le caffè Camparino est un café historique situé dans la Galleria Vittorio Emanuele II à Milan.

En 1867, Gaspare Campari s’installe avec sa famille et son commerce dans la nouvelle Galleria Vittorio Emanuele II. L’établissement est inauguré en présence du roi sous l’enseigne de Caffè Campari en 1867. Lieu symbole de la tradition de l’apéritif milanais, il est fréquenté dès son ouverture par de nombreuses célébrités du monde de la politique, de la musique, de la mode et des arts, tels que Giacomo Puccini, Giuseppe Verdi, Giulio Ricordi et Arrigo Boito.

Fidèle client, le peintre futuriste Umberto Boccioni, l’immortalise dans une de ses œuvres Rissa in galleria (Échauffourée en galerie) en 1910.

En 1915, sous l’appellation de Caffè Camparino, il est repris par son fils Davide qui révolutionne la façon de boire du Campari en installant, depuis le sous-sol, un flux continu d’eau de Seltz glacé jusqu’au bar. Entre 1923 et 1924, la décoration originale de style Empire est remplacée par un aménagement de style liberty auquel collaborent l’ébéniste Eugenio Quarti, le peintre Angelo d’Andrea et Alessandro Mazzucotelli pour les ferronneries.

Dans les nuits du 13 au 15 août 1943, la Galerie est touchée par les bombardements aériens alliés. La même année, la licence du bar-café est reprise par Guglielmo Miani, un tailleur des Pouilles arrivé à Milan en 1922.

Outre les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, au cours de son histoire, le Caffè Camparino a subi 87 fois des dommages aux fenêtres lors des manifestations politiques d’orientations diverses, qui ont toujours favorisé la très centrale Piazza Duomo et Galleria.

En octobre 1983, un accord a été signé entre la société Davide Campari-Milano Spa et l’entreprise Galleria SaS avec laquelle il a obtenu le droit d’utiliser le nom « Camparino » comme enseigne pour le bar-café situé dans la Galerie. L’entente sera renouvelée le 3 décembre 1990 et le bar sera agrandi, incorporant également les locaux de l’ancienne bibliothèque d’État.

Le 30 janvier 1996, l’accord pris fin et le bar sera renommé Caffè Zucca.

Le 3 janvier 2012, après 16 ans, le bar est de nouveau estampillé Caffè Camparino et restauré tout en conservant son authentique atmosphère Campari et son caractère profondément cosmopolite, le café est redessiné par l’artiste Ugo Nespolo.

Davide Campari

Davide était le quatrième de cinq enfants : Giuseppe, Antonietta, Eva et le plus jeune fils Guido. L’aîné, se lance dans une carrière littéraire et ne s’intéresse jamais aux affaires de l’entreprise, c’est donc tout naturellement qu’après la mort de son père, Davide et son frère Guido prennent les rênes de l’entreprise, rebaptisée Gaspare Campari – Fratelli Campari Successori. Davide, qui avait également étudié en France, ouvrit une petite fabrique de liqueurs et de sirops via Corsico à Milan, et essaya d’améliorer de plus en plus le fameux Bitter créé par son père.

Il crée une nouvelle liqueur, qui connaît le même succès que celle de son père, le Cordial Campari, à base de framboises de montagne macérées dans du Cognac et inspirée des produits français alors très appréciés, comme la « Chartreuse » et la « Bénédictine ».

En 1904, Davide ouvrit une usine à Sesto San Giovanni, tandis que la gestion du café resta à son frère cadet, Guido.

Davide Campari était un véritable entrepreneur et avait une approche extrêmement moderne de la gestion de l’entreprise, il a séparé l’activité industrielle de l’activité commerciale, il s’est spécialisé dans la production de quelques produits à succès et a élargi les points de vente non seulement en Italie, mais aussi à l’étranger.

En 1906, Davide Campari est juge à l’Exposition universelle de 1906 de Milan, où les produits de l’entreprise sont également présentés.

En 1910, l’entreprise devient Davide Campari & C. En 1915, le café change de nom et devient le Caffè Camparino.

En 1916, 30 ouvriers travaillaient à la production et leur nombre est passé à 50 en 1919, année où Davide Campari a séparé les divisions de production et de vente.

En 1926, Davide décide de changer la politique de l’entreprise en concentrant la production sur les boissons les plus connues et moins similaires aux autres produits existants, l’apéritif Campari Bitter et le Cordial Campari.

En 1923, il ouvre une nouvelle usine à Nanterre.

En 1932, il lance la production du Campari Soda (Camparisoda), un mélange prêt à l’emploi de Campari et d’eau gazeuse. C’est le premier apéritif monodose au monde. Une campagne publicitaire moderne fut confiée notamment au peintre italien Fortunato Depero appartenant au mouvement futuriste.

Au cours de ces années, il a également décidé de donner à l’entreprise une dynamique internationale et a ouvert diverses succursales en Argentine, à Buenos Aires.

Sous la direction de Davide Campari, l’entreprise familiale a également établi des normes en matière de marketing dans les années 1920 et 1930. Des artistes tels que Dudovich, Villa, Cappiello, Munari, Negrin et Nizzoli ont été engagés pour des campagnes publicitaires et leurs affiches ont été largement exposées. L’artiste Fortunato Depero, représentant du futurisme italien, a conçu la bouteille simple pour Campari Soda.

Davide Campari mourut à Sanremo le 7 décembre 1936 et fut enterré au cimetière monumental de Milan. À sa mort, n’ayant pas d’enfants, la direction de l’entreprise passa à son frère Guido, sa sœur Eva et son neveu Antonio Migliavacca, fils d’Antonietta.

Campari Soda

Le Campari Soda est un apéritif à base d’eau gazeuse et de 10 % d’alcool contenu dans une bouteille en verre blanc dépoli de 9,8 cL, sans étiquette (inscription du logo en relief) et de forme conique.

Le Camparisoda est né en 1932, il est le premier mélange « prêt à l’emploi » de l’histoire des produits des cocktails. Dès sa création, Davide Campari souhaite associer à l’art son nouveau produit, le Camparisoda et plus particulièrement à l’art de son temps : le futurisme.

Les futuristes sont les premiers à établir une harmonie avec le nouveau monde industriel, comprenant le caractère innovant de la communication publicitaire et les liens forts existant entre l’industrie, la publicité et la production de formes d’expression.

Il s’associe donc avec Fortunato Depero l’un des représentants les plus actifs et les plus illustres de ce mouvement artistique et qui avait créé, en 1919, la « Casa d’Arte Futurista », aux fonctions comparables à celles de l’agence de publicité actuelle et développe une stratégie de communication originale pour la société Campari.

À la demande de Davide Campari, il conçoit une bouteille originale, à la forme d’un gobelet inversé, pour le Campari Soda. Aboutissement d’un partenariat artistique qui a commencé dans les années 1920, avec cette création, il signe son œuvre la plus aboutie pour le compte l’entreprise milanaise et dont le design est resté inchangé.

Pour Depero lui-même, l’art doit aller de pair avec l’industrie, la science, la politique, la mode de l’époque, en les glorifiant. Camparisoda est l’un des produits les plus importants du Groupe Campari et son principal débouché est l’Italie.

Cocktail « Il cardinale »

Si en France le cardinal (sans e), appelé aussi communard, pour sa couleur rouge, est un descendant du kir, fameux apéritif d’origine bourguignonne associant crème de cassis et vin rouge.

En Italie, il renvoie à 2 cocktails, l’un populaire et l’autre officiel. Le nom dérive de la couleur que prend le cocktail une fois préparé, appelée rouge cardinal.

  • La version populaire

est un cocktail apéritif très simple réalisé, il suffit de mélanger une demi-boîte de soda à l’orange amère et une bouteille de Campari Soda dans un verre. Ajouter de la glace et une tranche d’orange. Le verre est presque toujours un gobelet de capacité adéquate. Il peut également être préparé avec du jus d’orange ou du jus d’orange douce à la place du jus d’orange amère ou avec des amers à la place du Campari Soda. Il est souvent commandé « Un cardinal en deux » ou « Un cardinal pour deux » car avec le contenu d’une canette de 33 cl deux cocktails sont réalisés.

C’est un cocktail à l’origine présumé du Latium, s’est largement répandu sur tout le territoire italien depuis les années 1960, notamment dans le Centre et le Sud. Au Nord, cependant, la diffusion est plus limitée en raison de la concurrence du spritz et du Negroni.

  • La version officielle de l’IBA

La version officielle de l’IBA (International Bartenders Association) est très différente, il s’agit d’un cocktail d’apéritif servi dans un verre à cocktail. Le cocktail est répertorié comme « Cardinal » sans le « e » final. Sa recette comprend : 4cl Gin, 2 cl de Vermouth sec, 1 cL Campari Bitter. Préparez dans le verre à mélange et servez avec un zeste de citron, sans glace.

  • Recette originale des années 50

La recette officielle d’IBA diffère peu de celle originale née à Rome dans les années cinquante. Les différences sont évidentes non seulement dans les proportions et les garnitures, mais aussi dans le choix du vermouth au lieu du vin blanc. De plus, la recette originale le considérait plus comme un cocktail d’apéritif que comme un apéritif, car il voyait le cocktail servi dans un Old fashioned avec de la glace. Sa recette comprend : 1/3 de gin, 1/3 de Riesling, 1/3 Campari Bitter. La garniture est composée de zeste de citron, de cannelle et de clous de girofle.

Initialement attribué au Harry’s Bar de Venise, ce coctkail a des origines remontant aux années 1950 et a été créé par Giovanni Raimondo à l’Hôtel Excelsior de Rome.

Le groupe Campari

Avec la mort de Davide Campari et de sa sœur Eva, en 1943, l’autre frère Guido Campari et son neveu Antonio Migliavacca transforment l’entreprise en Davide Campari – Milano SpA. Les 70 et 80 voit une expansion continue de l’entreprise, avec l’ouverture de nouvelles unités tant commerciales que de production en Italie, mais aussi à l’étranger.

En 1982, la dernière héritière de la famille Campari, Angiola Maria Migliavacca, vendit la Davide Campari – Milan à Erinno Rossi et Domenico Garavoglia qui en devinrent les propriétaires.

À partir de 1995, la société a entrepris une politique de grand développement de l’entreprise à travers une vingtaine d’acquisitions d’autres opérateurs du secteur, dont : les activités de Barbero entreprise fondée en 1891 propriétaire de la marque « Aperol ».

En 2001, l’entreprise est cotée à la Bourse de Milan. En 2017, Gruppo Campari se classe au sixième rang mondial des spiritueux de marque. L’entreprise detient de nos jours plus de cinquante marques dont : Campari, Aperol, SKYY Vodka, Wild Turkey, Grand Marnier, Glen Grant, Cinzano…

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